La situation n'avait plus aucun rapport avec l'esprit de Noël ; les idées et les envies qui traversaient l'esprit de Franklin étant bien loin de convenir à une telle fête. Alors qu'il avait fait l'effort de garder ses mains à distance, voilà que Jaime brisait le tabou de l'espace entre leurs deux corps pour plaquer ses mains sur lui et le forcer à reculer jusqu'à la carrosserie de sa voiture. Les mains de Franklin se cramponnèrent derrière lui et il fit de son mieux pour rester impassible aux gestes engageants de la jeune femme. Il ne releva pas son sous-entendu concernant sa possible réserve d'« anges » pouvant lui tenir compagnie à chaque fête de l'année. Jaime ne pouvait pas s'en douter, mais elle n'aurait pu être plus loin du compte. Il tenta de cacher sa surprise lorsqu'elle déclina l'idée d'être choquée par ce qu'il venait de dire. De toute évidence, elle en avait vu d'autres dans le genre et Franklin commençait sérieusement à douter de l'auréole qui brillait habituellement au dessus de la tête de la jeune femme. Il eut même le vague sentiment qu'elle avait elle-même déjà été à l'origine d'une telle proposition déplacée. Quand une des mains de la jeune femme revint narguer sa poche, Franklin se redressa brusquement et fit de son mieux pour continuer à soutenir le regard provoquant de sa voisine. Le norvégien était une fois de plus sensible à ses gestes engageants : Jaime était une femme aussi imprévisible qu'attirante, son attitude à cet instant suffisait à couper le souffle à Franklin. Il redescendit cependant sur Terre au moment où elle avança l'idée qu'il ne puisse pas être compétent dans le domaine des « remerciements ». Son égo venait d'en prendre un coup et il fut suffisamment refroidit pour enfin réussir à faire abstraction des gestes vicieux de la jeune femme. Même ses lèvres se rapprochant des siennes n'eurent guère sur lui l'effet escompté. Son visage s'était obscurcit et il se mit à ressentir une pointe de satisfaction sadique en la voyant soudain se maudire pour ses actions. Jaime l'abandonna alors et lui fit dos avec résolution. Ce brusque changement d'attitude ne le surprenait qu'à moitié : qu'avait-il espéré venant d'elle ? Et pourtant, il éprouva une légère déception en la voyant camper sur sa chaste décision. Il fit un pas vers elle, un bras levé comme pour venir le poser sur la hanche de la jeune femme mais se rétracta au dernier moment, laissant sa main brasser l'air à la place et venir se plaquer contre son propre flan. Il ne voulait pas la tenter d'avantage. Il ressentait à son égard bien trop de respect pour se laisser séduire par l'idée de la provoquer et de la corrompre d'avantage simplement pour satisfaire son égo. « Relax, Jaime. » dit-il d'un ton las, presque sévère. Lui-même n'avait pas envie de suivre son conseil mais il allait tout de même le formuler, sachant pertinemment au fond de lui que c'était la meilleure chose à faire. « Rentre chez toi. J'ai suffisamment profité de ta compagnie, ce soir. » De dos à lui comme elle l'était, Jaime ne pouvait pas voir Franklin retenir un soupire avant de, à son tour, faire volte face et retourner vers sa voiture. Il donna un dernier coup au sapin pour ranger les dernières épines rebelles et ferma dans un claquement trop fort le coffre de sa voiture. Il attrapa ses clefs et avant de grimper à l'avant, lança à l'adresse de la jeune femme, ressentant l'étrange sensation qu'il commettait une erreur. « Je suppose qu'on se recroisera quand le type du hangar voudra te donner rendez-vous. Ou plutôt "me" donnera rendez-vous. » réussit-il à compléter d'un sourire complice en écho à ce qu'elle avait fait plus tôt en fournissant son numéro au vendeur. Il leva son index contre son crâne et lui fit un signe de salut avant de s'engouffrer dans sa voiture, et de rejoindre Ocean Grove.