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 « Tu brilles aussi fort qu'un miroir de bordel. » (Wade H.)

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« Tu brilles aussi fort qu'un miroir de bordel. » (Wade H.) Vide
Message(#) Sujet: « Tu brilles aussi fort qu'un miroir de bordel. » (Wade H.) « Tu brilles aussi fort qu'un miroir de bordel. » (Wade H.) EmptyDim 13 Nov 2011 - 16:51

« Cecil, tu veux bien, ne serait-ce qu'une minute, cesser de penser en matière de bénéfices immédiats ? Je te parle d'une campagne internationale, sur tous les supports imaginables, avec un message que tout le monde sera obligé de retenir. »
« Combien Julia ? »
« Tu vois, c'est ça qui m'agace avec toi. T'entends rien, on peut pas discuter. T'as tes foutus chiffres devant les yeux et tu vois jamais plus loin. J'ai bossé comme une dingue sur ce projet. »
« Désolé d'être aussi soucieux de la sauvegarde des intérêts de l'entreprise. C'est vrai, ma petite sœur a travaillé si dur, je ne peux décemment pas la priver de son cadeau de Noël, et cela même si ça doit nous coûter des millions de dollars. »
« Tu recommences, putain ! Dès qu'on est en désaccord, tu m'infantilises. Je ne suis pas une gamine, je connais mon boulot et j'ai beau ne pas être l'enfoiré de PDG de la boîte, question marketing, j'suis imbattable. Si je te dis que mon projet est viable, c'est qu'il l'est bordel. »
« Toi, t'as encore fait l'impasse sur les anxio ce matin. J'crois qu'au point où tu en es, il vaut mieux que tu doubles la dose. »
« Va t'faire foutre. »
« Je préfère qu'on en reste là pour ce soir Julia. Il est tard, je vois que tu es sur les nerfs, d'après ce qu'on m'a dit, tu n'as pas dormi depuis des siècles, alors ça ne sert à rien. Et pour te prouver que je ne suis pas le gros con pour lequel tu essayes de me faire passer, je te promets que je vais étudier tout cela en détails. »
« En détails ouais. A lundi »

Julia se tassa littéralement dans son fauteuil, contemplant une dernière fois le visage de Cecil sur leur conversation visio avant qu'il ne disparaisse enfin. Plus elle travaillait avec son frère, plus leur relations se dégradaient. Il était obtus, fermé et il avait l'ambition et le goût du risque d'un taille-crayon. Et il avait surtout presque tout pouvoir. Il prenait l'avis de Julia en compte, un peu parce qu'elle était sa sœur, beaucoup pour ses parts dans l'entreprise, mais pas assez à son goût. Elle avait passé deux mois entiers, presque nuit et jours avec son équipe à monter un événement com sans précédent et ce type croyait qu'il pouvait cracher dessus sans même y avoir jeté un œil. Elle referma rageusement son portable et laissa sa tête retomber lourdement dessus, au moment même où elle entendit frapper. Devon. Il avait toujours la délicatesse de prévenir alors même qu'il s'agissait de son bureau. Elle aimait cet endroit, sobre et masculin, propice à la concentration.. et aux engueulades avec son ainé. Elle se contenta d'un grognement à peine audible mais il sembla comprendre, et entra. « Je crois que tous nos voisins sont au courant que ton boss est un pauvre con maintenant. Ce qui n'est pas forcément une mauvaise chose si tu veux mon avis. » Elle ne voulait pas sourire, faire l'enfant contrariée et boudeuse, mais le charme Devon avait opéré. Ce type était littéralement magique et Julia ne pouvait pas lutter. Elle n'avait jamais pu, depuis la toute première fois. Il vint se placer derrière elle et entoura ses épaules de ses bras. « Tu sais ce dont tu as besoin ? D'un bon verre de whisky, celui que je garde tout spécialement pour les investisseurs. » Elle acquiesça, visiblement séduite par la proposition et tendit les lèvres l'espace d'un baiser fugace, compensation après tout hautement méritée. « Je vais devenir folle Devon.. Il se fout de ma gueule, il n'a aucune considération pour tout le boulot que j'abats dans cette foutue boîte. »  « Si tu cessais de le harceler le week-end, il se montrerait peut-être plus enclin à avoir de la considération comme tu dis. » « Alors t'es de son côté ? » « Du côté obscur de la force ? Jamais, mon amour. » Il avait raison, comme toujours. Et elle était trop épuisée pour s'en agacer. Elle avait besoin de ce whisky, d'un prozac et d'une bonne douzaine de nuits de sommeil. « Tu verras, il accroche un peu, mais c'est pour la bonne cause. » glissa t-il en lui tendant le verre. Trois glaçons, parce qu'il la connaissait par cœur. Au même instant, ils entendirent tous deux trois coups distincts à la porte. Devon fronça les sourcils. « Putain, il est vingt-trois heures.. Alors disons que je vais m'enquérir de l'identité du malotru, le foutre à la porte quoi qu'il arrive et tu n'auras même pas remarqué mon absence ma chérie. » Julia sourit et trempa ses lèvres dans un whisky qui, effectivement, méritait amplement qu'elle projette d'en boire un deuxième.


Dernière édition par Julia Hollingworth le Dim 13 Nov 2011 - 21:16, édité 1 fois
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Message(#) Sujet: Re: « Tu brilles aussi fort qu'un miroir de bordel. » (Wade H.) « Tu brilles aussi fort qu'un miroir de bordel. » (Wade H.) EmptyDim 13 Nov 2011 - 21:08

En cette nuit sommaire, la demeure Hollingworth restait plongée dans la pénombre. Sous les grésillements d'une ampoule éclatée, Wade remuait le fond d'un vin médiocre. Absent, il n'écoutait que le silence, résumé par des bribes de conversations lointaines et le passage de quelques voitures des gens biens de ce monde. A l'étage, il pouvait entendre son fils, cet acharné virtuel, massacrer son clavier. Il le soupçonnait vaguement d'anéantir sa vie dans une réalité bien peu réconfortante. En cette soirée, les murs avaient l'air moqueurs, ironiques, et glaciales. Il déraisonnait au rythme lent de l'alcool, perdu goutte à goutte dans le fond de sa gorge. Ses émotions se fragilisaient doucement, voguant entre une profonde mélancolie et le désir soudain de conquérir une femme. Incapable de se muer davantage, il alla jusqu'à la fenêtre, souleva un pan de rideau et scruta l'extérieur. Tout était aussi calme et triste qu'ici, à la différence qu'il n'était pas affligé de voir la douleur de quiconque. Dans cet endroit, il n'y avait que lui. Lui et cette souffrance absurde.

« Papa ? » Grognant vaguement, Wade haussa un sourcil sans prendre la peine de se tourner. « L'ampoule est cassée ? » Pour confirmer son ersatz de théorie fumeuse, le gamin appuya frénétiquement sur l'interrupteur, ce qui n'eut pour effet que d'agacer les tempes de son géniteur. « Finement observé, lui confirma froidement celui-ci.  D'autres observations ? » « Tu as bu ? » Lloyd posait probablement sa question pour la forme, puisque Wade eut tout le loisir de l'entendre soulever la bouteille et la jeter telle quelle. « Maman devait m'appeler. Il est déjà dix heures... » « Elle a probablement du travail, marmonna son père. » « Elle m'appelle toujours quand je suis ici. » « Humpf. » « Papa... » Wade se tourna, les traits couverts d'ombres nocturnes. « Quoi ? Tu as seize ans, bordel. Tu n'as pas encore soigné ton oedipe ? » Un moment interdit, Lloyd le scruta. Puis son visage se tordit d'une aura plus moqueuse, et plus vindicative, aussi. « Tu peux parler. » Wade lâcha son verre sur le carrelage de la cuisine. « Ne me parle pas ainsi. » « Sinon quoi ? » « Lloyd... Je me fous de ce que ta mère te dit. Quand tu es ici, chez moi, tu ne me parles pas comme ça. » Le gosse soupira en sortant de la pièce. Voilà à quoi se résumaient leurs relations. Si Lloyd ne se comportait pas en fils, Wade ne se comportait pas davantage en père. Ils étaient deux parfaits étrangers. Deux hommes opposés, qu'une seule femme liait.
Extirpant son téléphone portable, Wade composa le numéro de Judith. Une sonnerie. Puis une autre. Et, enfin, ce fichu répondeur. « Judith Dahl. Je ne suis pas disponible pour le moment, rappelez-moi au ##, ou laissez-moi un message. » Il rappela. Sept fois. Il était proche d'onze heures quand elle décrocha enfin. « Tu me harcèles, maintenant ? » « Ton fils. » « Quoi, mon fils ? » « Il tient absolument à te parler, lâcha la voix agacée de Wade, sans quoi il sera incapable de faire de jolis rêves, ironisa-t-il enfin. » « C'est comme ça que tu t'occupes de ton fils ? » « Jude... » « J'étais en conférence. On a fini tard. » « Un dimanche ? » « Nous sommes divorcés, je te rappelle. Allez, passe-le moi... » « Lloyd ! hurla-t-il dans le combiné. » Wade entendit passablement les remontrances de Judith mais n'y prêta guère intention. Le jeune homme parut quelques minutes plus tard. « Eh bien, enfin. Ta mère. » Il lui passa simplement le téléphone, et quitta la cuisine. Ce qu'ils pouvaient se dire, lui s'en moquait. Certainement, aussi, parce qu'il restait convaincu que leur plus grand divertissement était de médire à son sujet. Cette idée le laissait généralement de marbre. Ce soir, encore.

Le pas tranquille, il gagna l'entrée, tira la porte et demeura sur son seuil. Ocean Grove était trop tranquille à son goût. D'avoir vécu quelques dix mois en plein cœur de New York, il s'était habitué à une agitation constante, de midi à minuit, et de minuit à midi. En dépits du fait qu'il ait grandi ici et qu'il y soit revenu depuis quelques années maintenant, Wade restait constamment perplexe. Il ne se sentait pas chez lui. Comme nulle part, au demeurant, mais dans cet endroit moins encore. Il n'y avait qu'une seule raison pour qu'il accepté de reprendre la maison de ses parents. Et cette raison vivait à quelques mètres de là. Toute la soirée, il avait enduré une sorte de difficile coma, comme s'il avait été susceptible d'endurer le supplice d'une lame sous sa peau sans pouvoir le hurler. Quelque chose le perturbait, oui, voilà, et il était incapable d'y remédier. Pas qu'il en ignorait la source, mais parce qu'il était tard, et que tout jumeau qu'il était, il n'avait aucun droit de séjour spécifique.

Et ce fût sans droit qu'il traversa la rue, laissant inconsciemment la porte de la demeure grande ouverte. Il hâta le pas au passage d'une voiture, et n'accorda qu'une moindre attention au conducteur. En une poignée de minute, il fût sur le pas d'une maison ne lui étant que trop bien familière. Il frappa par trois fois, et patienta aussi laborieusement qu'il en avait la coutume. Lorsque la porte se dégagea, il vit la haute stature de Devon l'accueillir avec son peu de diplomatie du dimanche soir comme du mardi midi. « Wade ? Qu'est-ce que tu fiches là ? » « Je te le demande, moi ? » L'homme le toisa, l'air de ne pas comprendre. Après tout, il s'agissait bien de son domicile. Et puis... bref. « Qu'est-ce que tu veux ? » Toujours plus agacé, Wade trépigna sur place. « Refaire ta façade, râla-t-il. A ton avis ? Laisse-moi entrer, il fait froid. » De mauvaise grâce, Devon lui céda le passage. Plus qu'aucun autre soir, il semblait très peu disposé à l'accueillir chez lui. Ce n'était pas si étonnant, mais Hollingworth le nota. « Où est-elle ? » Devon soupira bruyamment. « Ecoute, il est tard, tu as l'air énervé... ça peut attendre demain, sans doute ? » A aucun moment Wade ne prit la peine de considérer sa remarque. Sa réponse, en vérité, il la détenait fort bien. Mais chaque politesse semblait n'être que du temps perdu. Il le doubla, traversa le couloir et gagna le bureau. Il poussa la porte et la referma aussitôt, en verrouillant l'accès. « Tu te rappelles du bois où... chut, la coupa-t-il en observant sa surprise autant que sa répartie en devenir, tu te rappelles du bois où on restait pendant des heures quand on était gamins ? Je veux y aller. Maintenant. » Il suffoquait étrangement. Cela aurait pu passer pour de l’essoufflement. Oui, cela aurait pu. Pour n'importe qui, sauf pour Julia.
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Message(#) Sujet: Re: « Tu brilles aussi fort qu'un miroir de bordel. » (Wade H.) « Tu brilles aussi fort qu'un miroir de bordel. » (Wade H.) EmptyDim 13 Nov 2011 - 21:17

Une chose était sûre : Julia ne voulait voir personne dans son état. Et puis à vingt-trois heures, ce ne pouvaient être que les amis inintéressants de Devon. Elle ne se sentait pas de supporter les jérémiades de Kirsten à propos de sa troisième grossesse ô combien difficile ou les histoires de boulot des autres. Après tout, il avait promis qu'il le ou la foutrait dehors, enceinte ou pas, ça ne changeait pas la donne. Du bureau, elle entendait à peine des bribes de conversation troublant son tête à tête avec le douze ans d'âge. L'échange avait duré quelques secondes à peines, elle entendait déjà des pas précipités dans le couloir. Devon avait cédé. Parfois à son sens, il lui manquait sérieusement les couilles promises avec le contrat de mariage. D'autant qu'à l'oreille, elle devinait le manque certain de civilité du non-invité. La porte du bureau se referma aussi vite qu'elle s'était ouverte.. sur Wade. Elle allait ouvrir la bouche mais il la devança. « Tu te rappelles du bois où... chut. Tu te rappelles du bois où on restait pendant des heures quand on était gamins ? Je veux y aller. Maintenant. » Ils avaient beau avoir cette sorte de connexion, cette symbiose souvent fantasmée, jamais comprise, il avait toujours le pouvoir de la surprendre. Et de l'inquiéter en l'occurence. Il était au moins aussi pâle qu'elle et il manquait visiblement de souffle.. Elle se leva aussi prestement que sa fatigue le lui permit et se rapprocha tout près de son jumeau, encadrant son visage de ses mains éternellement trop froides.

A n'importe qui elle aurait argué la fatigue, la puérilité d'une telle entreprise, la nuit, le froid.. Mais à Wade, non. Elle n'avait jamais apprit à être adulte avec lui et devant son regard sombre rivé au sien, elle ne pouvait répondre que par l'affirmative. « Calme-toi. C'est d'accord, on y va, toi et moi. » Elle le connaissait par cœur : il s'était encore engueulé avec Judith ou alors il s'agissait d'une nouvelle histoire éphémère dont il était ressorti encore un peu plus vide. Ou alors ça n'avait rien à voir, mais il avait besoin d'elle. Et elle aussi. « Je vais prévenir Devon. C'est mieux si tu m'attends dehors. J'en ai pour une minute, je te le promets. » Elle déposa ses lèvres sur sa joue, à peine, comme s'il allait exploser à la moindre pression puis déverrouilla la porte. Elle rejoignit le salon où Devon, magnanime, faisait semblant de ne pas l'attendre. « Comment va t-il ? » « Oh ça va, il a juste besoin de parler. Tu sais, Judith, le gosse.. » « Je vois. » Il la regardait s'affairer, attraper un manteau, son sac à main. « Qu'est-ce que tu fais ? » « Euh, oui. C'est mieux si je passe la nuit chez lui. De toutes façons, je t'en avais parlé, je comptais passer le voir, c'est l'occasion. » « L'occasion.. Tu emportes aussi la bouteille de cognac.. » constata t-il devant elle, s'affairant à planquer une bouteille littéralement subtilisée dans la cuisine. « Tu peux aussi éviter de me prendre pour un con et me dire ouvertement que tu comptes te bourrer la gueule avec ton frère. Ce serait pas la première fois. Je pensais plutôt à une soirée tranquille tous les deux pour soigner le stress de ta semaine, mais soit. » « Devon, ne commence pas.. » « Je n'aime pas te voir jouer les adolescentes, c'est tout. Passez une bonne soirée, et n'hésite pas à appeler. A n'importe quelle heure, tu sais bien. » Pressée de quitter la maison et la culpabilité qui lui cinglait les épaules, elle bredouilla de vagues excuses, l'embrassa avec la meilleure volonté du monde, la passion en moins, pour s'élancer enfin vers la porte d'entrée.

Wade l'attendait, avec sa patience habituelle. « Aucun commentaire. » souffla t-elle en s'agrippant à son bras. « J'ai fais aussi vite que j'ai pu. Emmène-moi, tu sais que j'ai jamais pu me souvenir du chemin. »
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Message(#) Sujet: Re: « Tu brilles aussi fort qu'un miroir de bordel. » (Wade H.) « Tu brilles aussi fort qu'un miroir de bordel. » (Wade H.) EmptyLun 14 Nov 2011 - 19:14

Il était coutume de croire que les jumeaux se construisaient naturellement un monde dans lequel ils étaient capables d'évoluer en étant compris que de l'autre. Parfois, s'y associait un langage. Souvent, il s'agissait de codes. Le frottement du pouce sur l'index. Un grognement apparemment anodin. Un clignement distrait de l'oeil. Scientifiquement, il y avait peut-être cette dite connexion, mais Wade avait toujours raisonné en tant qu'il connaissait Julia comme il se connaissait lui-même, d'une réciproque toute aussi vraie comme toute aussi fatale. Les pédiatres et autres spécialistes de l'enfant avaient parfois parlé à leurs parents de sensations connus d'eux seuls, à peine perceptible pour le restant du monde. Avec le temps, cela non plus il n'avait su le vivre comme cela était transcrit sur le papier. A ses yeux, il n'y avait aucune collusion surnaturelle dans la relation qu'il entretenait avec Julia ; il ne tenait sa formidable et parfaite connaissance de son autre que de l'avoir toujours côtoyée comme l'on ne se quitte jamais soi-même. Effectivement, Wade avait cessé de croire depuis longtemps que sa douleur naissait d'un mal chez sa jumelle... tout ne naissait jamais que de son absence.

Aussi n'eut-il aucun scrupule à arracher Julia à son domicile conjugal. Il n'admettait que peu Devon, et cette tolérance s'arrêtait loin du dernier de ses cercles intimes. Il s'en allait d'ailleurs râler après l'attente quand elle l'en dissuada. Wade se tut, rabattant un pan de sa veste sur lui. Il faisait particulièrement froid, ce soir, à Ocean Grove, et il venait seulement de s'en apercevoir. Si cela ne l'aurait guère arrêté, le climat l'invita à saisir la main de sa sœur pour l'entraîner avec lui.

Soudainement, Wade s'était calmé. Sa respiration était lente et régulière, et son souffle s'extasiait dans la nuit calme. Il y avait une forme de tranquillité dans son être, comme le grand soulagement de se trouver complété. Enfin. Il tira Julia dans le parc, passa une allée, et puis deux, pour finalement s'enfoncer dans un petit bois citadin qui, sous son couvert de n'être qu'une dizaine d'arbres nains plantés là pour le peu d'écologie du quartier, initiait l'orée d'une immense forêt. Wade ne se rappelait pas y avoir bâti des cabanes, comme le font tant d'enfants. Il se souvenait davantage s'être abandonné au pied d'un arbre et y avoir soupiré son bien être pendant des jours entiers. Il se remémorait d'autant mieux un après-midi assoupi, où la nuit était tombée si brusquement qu'ils en avaient tous deux manqué le souper. La sanction avait été sévère, mais la leçon n'avait jamais été apprise. Cette liberté valait bien le supplice, d'autant qu'à subir le terrible châtiment, Wade aurait pu commettre cent fois le juste crime.
« Tu te rappelles ? » Il n'avait pas la moindre confiance en la mémoire de sa jumelle lorsqu'il la poussa dans une petite clairière. Et pour cause, ils n'y étaient pas venus depuis de nombreuses années maintenant. D'abord les études, puis les longues escapades wadiennes à travers le pays. Le temps qu'il revienne en Floride, ils avaient tous deux bien grandi, et d'autres préoccupations. Mais ce soir, cette nuit, oui, lui se sentait l'âme d'être encore un enfant.

Enfin, il lui lâcha la main et fit lentement le tour de l'endroit. L'herbe était bien plus haute que dans son souvenir. Probablement parce que la mairie n'avait plus jugé bon d'entretenir les lieux à hauteur de son charme. Par moment, il vit la silhouette de Julia disparaître dans le noir et l’inquiétude grandir en lui. Puis, au détour d'une saccade, elle réapparut à chaque fois, belle et bien là. Ce soulagement lui paraissait alors si intense qu'il provoqua chacune de ses craintes jusqu'à lasser et éreinter cent fois son cœur. Peu à peu, il revint vers elle, quand il fût enfin satisfait de son cadre et certain de ses repères. « Je me souviens, maintenant, de quand j'étais heureux. » Cet aveu lui fût fait du bout des lèvres, et le regard baissé, ombragé par les arbres. Il y eut beaucoup de tristesse sur les épaules de Wade en cet instant. Elle mit longtemps à s'évanouir, le temps qu'il lui fallut pour attirer Julia contre lui et l'étreindre comme avant. « Je ne sais plus pourquoi je suis parti. Et je ne sais plus non plus pourquoi tu es restée ici... avec lui. » Il s'agissait évidemment de Devon, que Wade vivait toujours comme un affront. Mais pas seulement. Il y avait Cecil, leurs parents, l'entreprise. Toutes ces choses auxquelles lui était incapable de s'attacher. Il éprouvait, bien sûr, beaucoup d'affection pour chacun d'eux, mais ce genre de chaînes le fatiguait rien qu'à l'idée de devoir les porter. Et puis, ce n'était en rien un reproche. Il y avait aussi un semblant de culpabilité, là, quelque part. Une culpabilité qui disait : « ...ça n'a servi à rien, de partir. »
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Message(#) Sujet: Re: « Tu brilles aussi fort qu'un miroir de bordel. » (Wade H.) « Tu brilles aussi fort qu'un miroir de bordel. » (Wade H.) EmptyDim 27 Nov 2011 - 15:30

Julia se laissa guider dans la pénombre, s'abandonnant à leurs mains soudées. Elle se souvenait parfaitement de l'endroit où il comptait l'emmener ce soir. Elle avait souvent réprimé l'envie ou plutôt le besoin impérieux d'y retourner pendant l'absence prolongée de son jumeau. Mais sans lui, les arbres n'aurait plus été que des arbres, cela n'avait pas de sens. « Bien sûr que je me souviens. Comment oublier les engueulades mémorables que j'ai du essuyer suites à nos escapades, par TA faute ! » répondit-elle en souriant. Quand ils arrivèrent enfin, Wade lâcha sa main. Elle suivit son ombre des yeux un instant, avant de faire quelques pas, s'imprégner de sensations qui n'avaient pas changé malgré les années. Même plongé dans l'obscurité la plus totale, l'endroit ne lui inspirait aucune crainte. Ici, on ne lui imposait personne sinon l'autre moitié de son être dont elle recherchait la présence avec une avidité chaque jour plus effrayante. Ils se frolèrent plusieurs fois, elle s'amusa à s'éloigner pour mieux le retrouver, jusqu'à ce que, lassé le premier, il l'attire finalement contre lui. « Je me souviens, maintenant, de quand j'étais heureux. » Quelque chose dans sa poitrine se serra douloureusement. Leur temps révolu faisait toujours naitre en elle les plus grands paradoxes. Souvenir, chaleur, mélancolie, frustration, tendresse et terreur la plus vive. Elle enfouit son visage au creux de son cou, creusant presque pour s'y fondre. Sous le parfum ambré, sa peau avait toujours la même odeur, celle des réveils tardifs, des courses à vélo et des bancs de la fac. Elle se souvenait aussi, de quand elle était heureuse.

« Je ne sais plus pourquoi je suis parti. Et je ne sais plus non plus pourquoi tu es restée ici... avec lui. » Elle sentit une tension imperceptible traverser le corps de son frère. Il n'avait jamais su se faire à Devon. Tout comme elle n'avait jamais su se faire à Judith. Souvent, elle se disait qu'ils auraient pu porter n'importe quel nom, il aurait pu être moins parfait, elle aurait pu être moins belle, cela n'aurait rien changé. Elle l'aurait haïe. Et puis elle oubliait, parce qu'il était tellement moins effrayant de croire que c'était Judith le problème. Ou Devon. Julia avait développé avec l'âge une capacité incroyablement affutée pour refouler à peu près n'importe quoi : son nombre incalculable de névroses, son acharnement anormal au travail, le désastre qui lui tenait lieu de vie de couple, et Wade.. L'ensemble d'une existence déjà morte dans le corps menteur d'une femme sublime. Tout fonctionnait à merveille en apparence, Julia savait s'en contenter. « Je suis restée ici parce que je suis lâche. Tu es parti parce que tu es lâche. Et tu es revenu parce que tu sais que tu préfères être malheureux ici, plutôt que loin de moi. » Tout était bien plus compliqué, Julia ne voyait pas l’intérêt d'énumérer toutes les raisons qui la retenaient à Ocean Grove. Elle aimait Devon, mais jamais elle ne le disait devant lui, il savait. Tout comme il aimait toujours son ex-femme, elle en était persuadée. A eux deux, ils représentaient en fait l'espoir naïf de détruire des turpitudes incomprises et douloureuses. Naïf. Voulaient-ils seulement cesser de souffrir ?

Ses yeux s'habituaient doucement aux ténèbres. Le visage de Wade se découpait dans l'ombre sous ses doigts. Elle s'autorisa un sourire, le regard planté dans le sien. « On pourrait rester ici pour toujours, tu veux bien ? A nous deux, on a assez de thune pour acheter la forêt toute entière. Quand tu ne me supporteras plus, tu pourras te tirer, marcher des kilomètres, tout en restant à la maison. Et moi je pourrais ranger toutes mes paires de chaussures dans cette vieille souche, ajouta t-elle en désignant un tas de branchages recouverts par la mousse. Qu'est-ce que tu en penses, hein, Wade ? Dis oui. » Elle avait quatre, cinq ans au bas mot à nouveau. Elle ne voulait pas penser au moment où il devrait la ramener, le moment qui viendrait trop tôt.
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