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 “ It's the colour of your skin ” (#9971)

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Message(#) Sujet: “ It's the colour of your skin ” (#9971) “ It's the colour of your skin ” (#9971) EmptyMar 25 Jan 2011 - 4:28


It's the colour of your skin... your skin is black metallic.



Harding & Hepburn
.


L’inscription « Numéro confidentiel » s’affichait sur l’écran du portable alors qu’il devait vibrer avec insistance, quelque part en Californie – sur la table de cuisine d’une villa esseulée en bord de mer, peut-être, ou dans la voiture d’un certain basketteur préoccupé par la route. L’appel traîna durant six sonneries avant qu’une voix masculine, enrouée et lointaine, ne se manifeste enfin. « Allô? » Pas de réponse spontanée de l’autre côté de la ligne : la personne qui avait cherché à contacter Nathaniel Hepburn ne semblait pas vouloir briser la glace. Perhaps because she adored the cold... « Hé, y’a quelqu’un? Si c’est encore d’un message enregistré pour me vendre un truc, je dirais à votre répondeur d’aller se faire f… » L’on s’éclaircit soudainement la gorge à l’autre bout du fil – ce qui coupa court au flot d’obscénités que Nate Hepburn s’apprêtait à marmonner contre son portable.

Un rire se fit entendre. Un rire somptueux et froid, qui s’estompa aussitôt mais que l’imagination humaine défigurait en un crescendo long et inquiétant. Un rire détaché qui paraissait pourtant opprimant. Il était impossible, à présent, de confondre l’interlocutrice; impossible pour le jeune homme de ne pas pressentir les mots qui allaient marteler le combiné. Le guet anxieux d’un timbre qui marquait attente et désertion, douceur et cruauté, évocateur à la fois de délivrance et d’une haine vorace. Le tout livré dans une tirade péniblement placide.
« As-tu toujours l’air aussi blasé lorsque tu réponds au téléphone, Hepburn? » Fidèle à ses habitudes, qui sans nul doute avaient persisté au cours de cette année où elle avait manqué à l’appel, Faith Harding trouvait le mot « Bonjour » beaucoup trop terne.

Silence.

« Harding. »

« Qui d’autre? » se moqua-t-elle tout en faisant écho aux pensées sarcastiques du jeune homme. Mais oui, pourquoi pas, qui d’autre? Douze mois avaient passé, au cours desquels elle ne daignait pas répondre à ses appels à lui – qui étaient devenus de plus en plus rares à mesure que la date de sa disparition se faisait reculée. Et elle insinuait qu’il aurait dû s’attendre à cette intrusion brutale dans sa vie, après un délai obscène sans nouvelles. Il avait constaté son nom de famille d’un ton acide : et malgré la voix inébranlable de Faith, et cette trivialité blessante qui vernissait ses paroles, elle ne s’attendait pas à trouver à l’autre bout du fil un accueil chaleureux. Et lui n’avait pas oublié, bien qu’il l’ait peut-être souhaité, qui était Faith ainsi que sa manière d’être. De toute façon, ce n’était pas comme si l’affection était de mise à l’époque où ils habitaient ensemble, alors pourquoi se répandrait-elle maintenant en retrouvailles à cœur ouvert?

« Écoute, Nate, je voulais t’avouer quelque chose : je ne pense pas revenir vivre à Los Angeles de sitôt. » Cette femme était vraiment une créature exaspérante. « D’ailleurs, je viens d’acheter une charmante demeure dans un quartier résidentiel de Miami, où je pense bien m’établir. » Le sarcasme parvenait même à percer à travers les trois mille sept cents kilomètres qui les séparaient l’un de l’autre. « J’adorerais que tu acceptes de m’y rendre visite. » Elle sourit au combiné. « Je t’enverrai un billet d’avion à destination de la Floride. Un aller-retour, si cela peut te rassurer. Tu seras libre d’arriver quand tu voudras – et de repartir avec la même aisance, mais à quoi bon partir, n’est-ce pas? »

Beep, beep, beep… Nathaniel Hepburn avait interrompu l’appel sans offrir de réponse.

Trois jours plus tard, il recevait une enveloppe dans laquelle se trouvait un billet pour un vol en première classe vers Miami, effectif au moment désiré. Seul hic, elle ne contenait pas de billet de retour. Elle avait dû oublier.

___________________________________________

La Mercedes noire surgit au tournant de Lemon Street dans un virage littéralement criminel. Au grand soulagement de ses résidents, la voiture n’avait pas fait d’apparition surprise depuis huit jours, en d’autres mots depuis qu’une mystérieuse jeune femme avait paru dans le quartier pour visiter une demeure marquée « À vendre ». On l’avait vue discuter rapidement avec l’agent immobilier; le lendemain, elle était reparue avec quelques valises, et avait attendu les livreurs qui avaient transporté plusieurs meubles à l’intérieur. Ce soir-là même, elle délaissait déjà sa nouvelle propriété et la porte demeura fermée jusqu’à ce qu’un nouveau personnage s’établisse à sa place à cette adresse, quatre jours plus tard : c’était un jeune homme au corps de rêve et à l’allure de sportif, qui encensa bien des commérages lors de son arrivée. Malheureusement, c’est le jour d’après qu’eut lieu l’ouragan qui déchira le quartier.
La vision dont Faith Harding était témoin à travers le pare-brise était peut-être celle d’un quartier en détresse, mais si elle réagit si peu à ce chaos général, c’était parce qu’un détail la secouait bien davantage. En effet, peu lui importait que les fenêtres des maisons soient en miettes, que des arbres arrachés à la terre aient décimé des pelouses modèles, et que le toit de sa propre maison ait été abîmé par le tronc d’un arbre qui avait cédé. La jeune femme aurait davantage tendance à penser avec orgueil que l’ouragan avait été orchestré à son honneur plutôt que de se désoler des réparations à faire. Et puis, enfin, qu’est-ce qu’opposait ce désastre géologique en comparaison à la vue de l’admirable Ford noire stationnée devant sa demeure, et placardée contre ce décor de catastrophe naturelle?
Les freins furent bruyamment actionnés. Un bruit sec, à la fois bref et chargé de tension, se fit entendre – signe qu’on venait de pousser la poignée du côté du siège avant. Lentement, trop lentement – ou était-ce peut-être une lourdeur disproportionnée par la fébrilité? – la porte de la fabuleuse Mercedes d’un noir éclatant s’ouvrit pour dévoiler sa conductrice. Une vague de cheveux d’une blancheur nivéenne scintilla sous la lumière alors que la jeune femme glissait hors de la voiture. Ses bottines noires à talons vertigineux s’appuyèrent sur l’asphalte, et Faith Harding s’éleva du haut de sa taille sculpturale. Tout y était, tel quel, intact et pourtant mieux encore: les jeans, certes délavés et dont les coutures étaient effilochées, mais qui se fondaient de manière exquise le long de ses jambes; le t-shirt noir dont la simplicité était effrontément signée Prada; la veste en cuir, enfin, dont la matière survivait autant à la pluie qu’au sang, pour ainsi dire.
On pouvait être subjugué par la chorégraphie que Faith Harding déployait rien qu’en sortant de son véhicule. D’abord, une conduite aussi périlleuse de cette voiture de collection ne présageait pas qu’une beauté scandinave en émerge. Et encore, le soleil de Miami et l’arrière-plan de ce quartier à la dérive ne faisaient que renforcer l’élégance de ses pas foulant la terre ferme.
La jeune femme claqua la portière derrière elle et, sans prendre la peine de se retourner vers sa voiture, le trousseau de clés dans sa main droite, elle appuya sur la commande qui verrouilla le précieux véhicule. Elle ajusta les lunettes aviateur à la bordure dorée qui dissimulaient son regard glacial, et s’immobilisa un instant sur le trottoir, devant la maison qui, selon ce que disaient les documents, lui appartenait à présent. Alors qu’elle se tenait ainsi, sa posture naturelle digne des images sur papier glacé, ce fameux sourire se matérialisa sur ses lèvres : celui qui effrayait ceux qui l’avaient connue, et qui tourmenterait bientôt ceux qui ne la connaissaient pas encore. Masque provocateur de confiance infaillible, il avait été invoqué sur commande pour couvrir l’ivresse qui se propageait doucement dans ses veines. Elle destinait ce sourire à la demeure devant elle, mais ce n’était pas véritablement la maison elle-même qu’elle observait; au contraire, ses yeux voilés par les verres fumés cherchaient à en scruter l’intérieur, à en percer les fondations. Son sourire était destiné à la silhouette qu’elle percevait derrière la fenêtre, cette figure imprécise qui vacillait au rythme des reflets de la lumière, qui se dérobait et se montrait de nouveau, et qui appartenait à Nathaniel Hepburn.

Elle s’avança enfin dans l’allée de la maison marquée 9971, faisant insolemment l’étalage de sa nonchalance en s’allumant une cigarette en cours de route. Sa démarche était une source intolérable de langueur : suivant ses pas, ses hanches se balançaient doucement de gauche à droite; par moments, sa cigarette s’égarait de ses lèvres pour suivre les caprices de sa main qui la tenait du bout des doigts. Faith passa à côté de la voiture qu’elle connaissait si bien et qui, réciproquement au souvenir qu’on avait de la jeune femme, était plus désirable encore dans ce contexte de destruction qu’elle ne l’était dans son imaginaire. Elle constata que la Ford 1960 n’avait souffert d’aucune cicatrice au cœur de cette tempête qui avait ravagé le quartier; son arrivée datait peut-être d’avant les dommages, ou alors elle avait été bénie par la chance qui veillait sur elle depuis cinquante ans. Vraiment, il fallait l’avouer : il s’agissait d’une sublime vieillerie.
Son avancée se fit plus indolente encore alors qu’elle longeait l’automobile : ce faisant, elle caressa le revêtement de la Ford, commençant par le coffre et remontant jusqu’au toit, avant de redescendre en effleurant le capot de ses doigts fins. Il était souvent dit, en Californie, que les deux colocataires entretenaient une relation obsessionnelle avec leur voiture respective : ils ne permettaient à personne d’en saisir le volant, et ils serraient les dents dès qu’on osait la toucher. Et pourtant ils jalousaient secrètement – et parfois même ouvertement – la voiture de l’autre, certainement à cause de la prohibition établie sur leur bien. Enfin, cela se comprenait : Faith était une conductrice détraquée et ce détail, allez savoir pourquoi, rendait Nate méfiant. De son côté, la jeune femme était convaincue qu’elle était la seule capable de maîtriser son véhicule avec une conduite aussi outrageuse – et elle savait très bien que Nate ne lésinait pas, lui non plus, sur la pédale d’accélération. L’embout grésillant de la cigarette, coincée entre son index et son majeur, était pointé vers le ciel mais longeait dangereusement la carrure d’un noir poli : une menace suffisante pour tout propriétaire de voiture aussi maniaque que l’étaient les deux jeunes gens.
C’est d’ailleurs à ce moment-là que la porte d’entrée claqua bruyamment. Peut-être était-ce la sécurité de sa voiture qui avait alerté Nate, ou alors il était agacé par cette chimère blonde, qui diluait son propre empressement dans des gestes d’une lenteur intolérable. Quoi qu’il en soit, il se tenait sur le perron, ses cheveux bruns et sa peau bronzée absorbant volontiers le soleil du sud des États-Unis, et ce malgré son air sombre et ses yeux fatigués. Elle l’aperçut du coin de l’œil, et cette fois ne prit pas son temps pour se retourner et braver son regard.

La fière contenance de Nate Hepburn mesura l’orgueil insolent de Faith Harding.

La tension était… délicieuse.


Dernière édition par Faith Harding le Dim 24 Avr 2011 - 3:43, édité 1 fois
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Message(#) Sujet: Re: “ It's the colour of your skin ” (#9971) “ It's the colour of your skin ” (#9971) EmptyMar 8 Fév 2011 - 5:22

    Le téléphone de Nate vibrait effectivement dans la poche de son jeans, quelque part en Californie. Pourtant, malgré le nombre de suppositions faites par le numéro confidentiel qui tentait de le joindre, jamais il n’aurait été possible pour quiconque de deviner où le garçon se trouvait. Confortablement avachis dans fauteuil, face à une psychologue âgé de plus de 50 ans, il observait en silence les aiguilles de l’horloge tourner, ignorant complètement celle qui lui souriait depuis une bonne demi-heure. Il hésita avant de répondre. Le jeune homme en était à sa troisième séance et il n’avait pas encore prononcé un mot. La semaine précédente, il avait osé écouter de la musique et la dame l’avait laissé faire, alors pourquoi lui en voudrait-elle d’avoir une conversation téléphonique? Au moins de cette façon, elle entendrait le son de sa voix. Nate sortit l’appareil et observa l’écran, les sourcils levés bien haut. Le numéro ne s’affichait pas, perçu comme étant confidentiel. Il appuya sur répondre en déclarant un « allô » des plus simples. Un long silence se fît, durant lequel le basketteur retira le téléphone de sur son oreille pour vérifier qu’il avait bien permit la conversation. Il demanda à la personne invisible si elle était là et, n’obtenant aucune réponse, il s’impatienta : « Si c’est encore d’un message enregistré pour me vendre un truc, je dirais à votre répondeur d’aller se faire f… » Il s’arrêta net, ayant cru entendre quelque chose. Et soudain, un rire s’éleva, brisant ainsi le silence.

    Le jeune homme se leva et s’éloigna de l’oreille attentive de sa psychologue. Il fit quelques pas dans la pièce, saisit par ce rire qu’il n’avait pas entendu depuis… Depuis bien trop longtemps. Il n’avait aucune idée de la façon dont il devait réagir. Ce rire froid et complètement déplacé en toute circonstance avait pourtant fait augmenter le rythme des battements de son cœur. Ce n’était pas, comme la majorité des gens, sans doute, parce qu’il était effrayé. Il éprouvait, au contraire, une joie intense. Ce rire unique et vicieux lui avait manqué, tout comme la personne qui l’émettait. Aucun sourire n’avait franchi ses lèvres minces, elles restaient closes dans un rictus incontrôlé. Il n’émit aucun son, il attendait qu’elle lui dise quelque chose. Bien sûr, elle le fit et les mots qu’elle prononça ne le firent pas rire du tout. Certes, il s’était attendu à tout sauf « bonjour » puisqu’il s’agissait de Faith et qu’elle n’était pas une femme ordinaire. Elle avait toujours le mot pour créer un malaise ou pour tourner le couteau dans la plaie et cela fonctionna. Cette réplique, dite à n’importe qui d’autre, n’aurait suscité aucune réaction négative. Un sourire peut-être, mais certainement pas le resserrement de la mâchoire et des poings. Or, Nate ne pu empêcher son corps de se contracter. Il s’empêcha d’émettre un son, mais les mots qu’elle lui avait balancés à la figure de manière si nonchalante le blessaient. Car elle aurait pu connaître sa manière de répondre au téléphone si elle avait daigné lui passer un coup de fil au cours de l’année qui venait de s’achever. Le silence dura quelques instants encore, avant qu’il ne soit capable de prononcer son nom : « Harding ». Il avait parlé sur un ton froid et haineux, à l’opposé de ce qu’il ressentait à l’instant. Il s’agissait d’un mot qu’il s’était dit à lui-même et ainsi, sa réponse le surprit.
    Effectivement, qui d’autre? Quelqu’un de normalement constitué ne reprendrait pas contact avec une personne que l’on avait traité comme de la merde. Il y a un an, elle avait disparu, sans laisser aucune trace. Elle ne lui avait laissé aucune indication sur l’endroit où elle était allée et le moment auquel elle pensait revenir. Elle ne l’avait jamais appelé, en un an et malgré les nombreux coups de téléphones que lui-même lui avait passés. Pas un mot en si longtemps, malgré tout ce qui lui était arrivé, comme s’il n’avait jamais existé. Bien sûr, il savait que Faith ne faisait pas dans l’amitié et que leur relation ne voulait certainement pas dire grand-chose pour elle, reste qu’il avait cru valoir un peu plus que rien du tout. Elle pouvait partir aussi facilement, sans un seul regret, sans une pensée pour lui et s’adresser à lui comme s’ils s’étaient quittés la veille. Il n’ajouta pas toutes les répliques tranchantes qu’il avait en tête parce qu’il ne voulait pas qu’elle sache qu’il lui portait encore de l’intérêt. Et enfin, elle expliqua la raison de son appel. Il se tenait dans un coin, dos à la dame à son bureau. « Écoute, Nate, je voulais t’avouer quelque chose : je ne pense pas revenir vivre à Los Angeles de sitôt. » Il émit un rire sans joie, est-ce qu’elle se moquait de lui? Non il n’avait pas du tout comprit qu’elle ne reviendrait pas après un an de silence parce qu’il était un imbécile qui espérait encore voir apparaitre la Mercedes au coin de la rue! Encore une fois, il tût ses commentaires et écouta ce qu’elle avait à dire. « D’ailleurs, je viens d’acheter une charmante demeure dans un quartier résidentiel de Miami, où je pense bien m’établir. » Quelle bonne blague! Le sarcasme aurait été perceptible par un sourd vivant en Chine! Nate avait très bien compris que son ancienne colocataire n’était pas une personne qui s’établissait quelque part. Elle resterait à Miami jusqu’à ce qu’elle en est marre et changerait de ville, de pays peut-être, comme elle savait si bien le faire. « J’adorerais que tu acceptes de m’y rendre visite. Je t’enverrai un billet d’avion à destination de la Floride. Un aller-retour, si cela peut te rassurer. Tu seras libre d’arriver quand tu voudras – et de repartir avec la même aisance, mais à quoi bon partir, n’est-ce pas? » Nate l’écouta jusqu’au bout et n’eut même pas envie de répondre. Il raccrocha dès qu’elle eut terminé de parler. Il resta debout encore un moment, le temps d’assimiler ce qui venait de se produire et retourna s’assoir à sa place initiale, comme si de rien était. La dame lui demanda qui était cette personne : Harding? Il ne répondit pas, ne faisant que la fixer avec colère et attendit les dix minutes qui le séparaient de la liberté.

    Il en avait presque oublié l’incident, convaincu qu’il ne recevrait plus de nouvelles lorsque trois jours plus tard, il reçu par courrier un billet en partance pour Miami au moment de son choix. Nate fouilla l’enveloppe afin de trouver le billet du retour et réalisa bien vite qu’elle avait négligé ce détail, tellement convaincu qu’il n’aurait pas envie de repartir. Une rage le saisit et il jeta le tout dans la poubelle. Quelle ne fût pas sa surprise le lendemain en voyant le billet posé sur le coin de la table. La femme de ménage l’avait trouvé et avait cru à une erreur. Il soupira, le billet en main.

    __________________________________________________


    Ce qui l’avait poussé à tout quitté de sa vie en Californie pour se rendre à l’autre bout du pays, chez une personne qui n’en avait réellement rien à faire de lui, échappait encore au basketteur. Il avait de nouveau senti le besoin de partir, considérant qu’il n’avait plus aucune raison de rester. Il n’utilisa pas le billet que Faith avait acheté pour lui, le garçon empaqueta ses effets et fît le trajet dans sa célèbre voiture. Il comptait passer quelque temps chez son ancienne colocataire avant d’aller s’installer ailleurs. Il ne savait pas où encore, sa ville natale le tentait bien, mais cela voudrait dire fréquenter son père et il n’en avait pas la force. Nate devait reprendre sa vie en main et ce n’était pas en côtoyant Faith Harding qu’il pourrait le faire. Il arriva quelques jours plus tard devant une maison vide. Il n’en fût presque pas étonné; la belle blonde était toujours ailleurs. Il sentit les regards se poser sur lui alors qu’il cherchait un moyen d’entrer. Un mot sous le paillasson écrit par la propriétaire et l’invitant à faire comme chez lui le fit secouer la tête. Elle lui indiquait où la clé se trouvait et il entra, laissant tous ses bagages dans la voiture. Il ne fît rien d’autre qu’attendre, pendant quatre jours entiers. Il était presque mort- si l’on prend en considération qu’un ouragan avait frappé la ville- et la jeune femme ne réapparaissait pas. Le beau brun avait eu une chance incroyable, il se trouvait dans un parking souterrain lorsque la catastrophe était survenue alors sa voiture et lui s’en étaient sortis indemne. Il n’était pas parti, car il était curieux de la revoir. Il était convaincu qu’elle n’avait pas changé une seconde, mais il était en colère et voulait des explications.

    Au bout du quatrième jour, il décida que c’en était assez. Il manquait des journées de cours, il n’avait pas encore terminé les démarches pour son transfert puisqu’il ne savait pas où il irait. Il s’apprêtait à laisser une note délicate à la délicieuse Harding : « Hope you’ll go to hell » lorsqu’un son familier le fît s’approcher de la fenêtre du salon. La Mercedes noire s’arrêtait net devant la maison, dans un crissement de pneus digne de la demoiselle. Nate se recula, incapable de la regarder. Ce serait donc ça leurs retrouvailles? Après tant de jours loin l’un de l’autre, elle arrivait quelques heures trop tard. Car il avait prit sa décision, il partait. L’envie incontrôlable de regarder pour s’assurer que c’était bien elle le prit et il s’approcha de nouveau. La silhouette fantomatique de la New-yorkaise le fît sourire. Après tout, elle lui avait manqué. Nate remarqua qu’elle avait le regard rivé vers lui et il redevint neutre. De ses doigts fins, elle caressait la Ford de manière beaucoup trop sensuelle pour qu’il ne comprenne pas le message qu’elle tentait de lui passer. Ils avaient un lien indescriptible, une relation si intime et haineuse à la fois. Une attirance incroyable les unissait, un désir inassouvi qui était peut-être le seul élément qui les faisait revenir sans cesse. Il savait déchiffrer ses regards, n’importe laquelle de ses répliques et toutes ses allusions. Il savait qu’elle ne faisait que jouer avec lui, car cette caresse lui était adressée. Nate et sa voiture ne faisait presqu’un, c’était la relation la plus passionnel qu’il n’avait jamais eu et Faith était parfaitement consciente de cela. Nate n’avait, jusqu’alors, pas remarqué la cigarette qui brûlait dangereusement près du véhicule. Il n’allait pas attendre qu’elle entre, premièrement parce qu’elle pouvait mettre le feu à la Ford et deuxièmement, parce que si elle entrait, il serait beaucoup plus difficile au jeune homme d’en ressortir.
    Il claqua la porte et resta quelques secondes à peine sur le perron, le regard posé sur la belle. Elle était identique à son souvenir; la pâleur de sa peau-presque translucide malgré le soleil sous lequel elle marchait presque tous les jours de l’année- la blondeur de sa chevelure qui malgré les apparences, n’avait rien d’un artifice; son blouson de cuir qui ne la quittait qu’en de rares occasions et sa démarche. Cette sensualité, cette grâce qui la suivait partout. En la voyant ainsi, souriante et beaucoup trop fière, la fureur revint. Il n’allait pas la laisser dire quoi que ce soit, il ne ferait pas durer cette tension entre eux qu’elle aimait tant à ressentir. Il s’avança à grande enjambé, l’air de ne pas plaisanter et déclara alors qu’il passait à côté d’elle en la bousculant un peu : « Dégage! » Évidemment, elle ne bougea pas une miette et se contenta de retirer ses lunettes de sur son visage. Croiser son regard le déstabilisa pendant une seconde, car quelque chose avait changé. Il ne sut dire la nature de ce changement, ni s’il s’agissait véritablement d’elle ou de lui, mais il fronça les sourcils. Cela ressembla à de la colère et il répéta : « Pousse ta voiture de mon chemin ou je n’hésite pas à la mettre en pièce ».
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Message(#) Sujet: Re: “ It's the colour of your skin ” (#9971) “ It's the colour of your skin ” (#9971) EmptyVen 11 Mar 2011 - 18:38

Dès qu’elle aperçut la Ford qui resplendissait contre le paysage désarticulé, un avant-goût victorieux excita l’orgueil de Faith Harding. Cet air triomphant se délecta ensuite de la silhouette devinée dans la maison, qui était mise à nu par l’absence de rideaux aux fenêtres. L’apparition précipitée de Nate au perron l’amena sans nul doute à l’apogée de sa suffisance – puisque les événements qui suivirent bousculèrent sèchement son assurance.
Le billet qu’elle avait envoyé à son ancienne adresse à Los Angeles – celle de Nate, en d’autres mots – n’avait jamais été réclamé. Du moins, tel était le verdict annoncé par le silence de la compagnie d’aviation. Les instructions qui leur avaient été données étaient pourtant claires : lorsque « M. Nate Hepburn » s’enregistrerait avec le billet à son nom, la réceptionniste devait en aviser celle qui avait commandé sa place à bord de n’importe quel avion à destination de Miami. Et ce, à la seconde où il aurait tourné le dos.
Lorsque la voiture noire du basketteur, campée avec culot près de l’entrée, lui sauta aux yeux, Faith en déduisit qu’il avait échappé à sa surveillance et comprit par le fait même comment il avait procédé. Elle ne le blâmait pas, quoiqu’elle l’enviait peut-être : si quelqu’un pouvait partager le plaisir de parcourir trois mille sept cent cinquante kilomètres au volant d’une voiture (soit quarante-cinq heures de conduite pour une personne normale et environ vingt-cinq pour Faith Harding), c’était elle. Il avait traversé Arizona, Nouveau-Mexique, Texas, Louisiane, Mississipi, Alabama, Géorgie… probablement en un seul élan, d’une trajectoire aussi directe qu’extatique, avec une rapidité perverse et l’enivrement d’une musique brute. L’autoroute était pour l’un comme pour l’autre un purgatoire auquel chacun vouait un respect religieux, et qu’ils vivaient par osmose lorsqu’ils se retrouvaient du côté passager. Quel blâme pouvait-elle donc lui imposer sinon celui de ne pas l’avoir laissé prendre part au voyage? Car cela avait un jour été le cas – une histoire qui confirmait le pouvoir aphrodisiaque dont la route lugubre les affligeait à tous coups…
Aussi, il était insensé de supposer qu’elle regrettait l’argent gaspillé pour le billet (plus un frais additionnel – et non-officiel – pour les services adjacents de repérage). Il était évident que si Faith avait voulu connaître l’endroit exact où se trouvait Nate Hepburn à n’importe quelle heure du jour, elle aurait trouvé un moyen d’obtenir l’information en quelques minutes. Mais n’était-ce pas justement le fait qu’elle n’avait jamais fait cette requête – qu’elle n’avait jamais cherché à savoir – qui blessait le principal intéressé?
Nate avait certes bravé les plans de la jeune femme, il avait contourné la voie qu’elle avait tracée pour lui, mais n’arrivait-il pas, au final, à l’adresse qu’elle lui avait indiquée? Elle lui avait dicté de venir la rejoindre, au cours d’un appel d’une trentaine de secondes, où elle lui avait à peine laissé le temps de répliquer. Alors qu’elle-même avait passé tout un an à le tourmenter avec une sonnerie qui s’éternisait, une sonnerie qui inévitablement se heurtait à un message enregistré. Et la voix qui délivrait cette déclaration d’absence, cette voix qui annonçait que la jeune femme n’était pas en mesure de répondre, et qui sous-entendait malicieusement qu’elle n’allait plus jamais l’être, n’était même pas la sienne. Elle semblait avoir éradiqué toute empreinte qu’elle avait laissée à Los Angeles, jusqu’au répondeur de son (ancien?) téléphone portable qu’elle avait dénudé de la seule parole qu’elle y prononçait : son prénom, qu’elle identifiait d’un ton glauque, au milieu du message enregistré. « Faith ». Quelques jours après son départ, ce « Faith » avait été remplacé par une présentation robotisée. « The person you are trying to reach », scandait la voix machinisée, « is unavailable at the moment ». « Please try again later », complétait la femme virtuelle qui par défaut accordait le même message à tout téléphone américain. Ce n’était ni une supplication, ni une invitation, ni même un mot d’excuse. Elle aurait tout aussi bien pu ajouter « But you shouldn’ waste your time ». « Please » n’était qu’un automatisme.
Cette offre qu’elle lui avait faite, que l’effet de surprise baignait de suffisance, il l’avait refusée; oui, il avait certainement voulu la refuser, en coupant la communication. Mais il était là, il s’était livré à elle, peu importe le moyen qu’il avait choisi pour le faire; il était là. Ce simple fait immunisait Faith contre n’importe quel reproche que Nate pouvait proférer contre elle. Bien entendu, elle était familière avec sa fierté, qu’à plusieurs reprises elle s’était amusée à échauffer et se plaisait aujourd’hui encore à provoquer. Elle savait parfaitement qu’il ne l’accueillerait pas les bras grand ouverts (une image d’autant plus saugrenue que ce genre de geste affectueux leur paraissait scandaleux). Elle anticipait ses reproches et se doutait avec exaspération qu’ils allaient excéder une simple remarque sarcastique soutenue par un sourire enjôleur. Mais qu’importe. Il s’était établi sous son toit suite à un seul appel énigmatique alors qu’elle n’avait jamais daigné expliquer pourquoi elle avait déserté le sien, malgré ses appels insistants. Faith se disait qu’elle avait gagné d’avance.
La jeune femme n’était donc pas tout à fait prête une telle réaction.

Nate Hepburn balaya d’un coup la solennité de leurs retrouvailles avec un pas décidé et impatient. Il la rejoignit en moins de deux, puis la dépassa pour gagner sa voiture, heurtant au passage l’épaule de la jeune femme – avec un charmant « Dégage! » en guise d’excuse. À défaut d’ébranler son corps resté de marbre face à la brusquerie du jeune homme, cela déplut néanmoins à la prestance de la mannequin. Elle révéla ses yeux qu’elle délivrait de leur voile sombre, suspendit ses lunettes Tom Ford à la poche arrière de son jean, et fixa le jeune homme exacerbé. Elle remarqua que Nate avait conservé la beauté brute, masculine de l’athlète qui se consacrait corps et âme à sa discipline. Ses yeux annonçaient la même détermination qui s’y trouvait toujours, mais qui à ce moment était redoublée par la colère qui lui était destinée. Faith avait peut-être laissé échapper l’occasion d’apaiser le basketteur, car son inaction sembla entraîner celui-ci plus loin dans son agressivité. Il reformula sa requête : « Pousse ta voiture de mon chemin ou je n’hésite pas à la mettre en pièces ».
Il se tenait devant elle, son sac de sport accroché à l’épaule, à l’avant-plan d’une banlieue démolie, et affichait pour seule intention celle de quitter les lieux. Cela eut pour effet de désarmer Faith Harding momentanément, une seconde de désarroi qu’elle affubla d’indifférence. Néanmoins, sa contenance physiologique, aussi puissante qu’elle fût, n’aurait jamais pu attiédir la confusion qui tentait de lutter contre ses gestes calculés. Ils ne s’étaient pas vus depuis un an, après tout. Et ils s’obstinaient à présent à prétendre qu’ils étaient de marbre l’un face à l’autre... Faith avec son mutisme et sa hauteur, alors que son corps était encore ébranlé du contact direct et violent de la peau de Nate contre la sienne. Et Nate, qui s’appliquait tellement à avoir l’air hargneux, alors qu’il avait du mal à cacher son plaisir de la revoir.
Ainsi, il désirait partir? Il s’était rendu jusqu’ici, sans qu’elle n’ait pu se douter de son arrivée, et au moment où elle faisait son apparition, il choisissait de se défiler. Pensait-il vraiment que Faith allait tolérer cette offense à son magnétisme? Et croyait-il réellement qu’elle allait le laisser faire aussi facilement? N’importe quoi…

Elle s’appuya gracieusement contre la Ford de Nate, et brisa finalement son silence, ignorant l’ordre cassant de son ancien colocataire. La jeune femme lui imposa au contraire un sujet de conversation qui était plus à son goût; une diversion avouée. « Cette voiture », commença-t-elle. « Elle me rappelle… » Son discours à peine entamé fut coupé court par un regard acerbe. Auquel Faith réagit immédiatement. « Oh, ne me regarde pas comme ça! Si tu comptes partir si vite permets-nous au moins d’échanger quelques politesses. Il faut évoquer un ou deux souvenirs et se promettre une rencontre prochaine qui n’adviendra jamais… » Elle avait haussé la voix, et son intonation était devenue plus ardente, plus fébrile, rythmant sa plaidoirie de montagnes russes que son ton suivait dans une colère mélodieuse. « Il y a certaines formules à respecter quand on se dit adieu, Hepburn! Ce n’est que lorsqu’on est sûr de se revoir qu’on peut se permettre de partir sans rien dire. »

Le temps d’un soupir feint, elle avait déjà calibré son ton, et imposa le retour au sujet dont elle ne voulait pas démordre; malgré les interjections sarcastiques de Nate qui brisaient son discours. « Je disais donc – ta Ford me rappelle notre première aventure. » Elle sourit, ses yeux affrontant ceux de Nate. « Je m’en souviendrai toujours comme de la première fois » – elle marqua une pause – « où tu m’as offert de la conduire. » Elle tira une dernière bouffée de sa cigarette, avant de jeter ce qu’il en restait un peu plus loin, directement sur «leur» pelouse. Le mégot scintilla durant quelques secondes, puis se refroidit d’un coup. « Tu n’as jamais renouvelé l’offre, à mon grand regret » Elle soupira: « Bref… »
Ce propos mesuré devenait intenable, pour celle qui le prononçait tout particulièrement, mais aussi pour Nate qui opposa soudain à son récit une protestation rageuse. Mais alors que ses lèvres articulaient des phrases qui visaient justement à retenir l’attention de Nate le plus longtemps possible, son esprit aiguisé cherchait activement une machination pour le retenir, lui, à Miami – et ce, aussi longtemps qu’elle le désirait.

Son regard percutant ne tarda pas à s’embraser d’une lueur mauvaise, un symptôme qui annonçait l’avènement d’une idée insidieuse. « Je vais enfin te rendre la faveur », déclara-t-elle soudain. « Tu veux partir? Ma voiture te gêne? » Faith désigna sa Mercedes de la tête. « Eh bien vas-y. » Elle lui montra le trousseau de clés qu’elle comprimait dans sa main droite, son corps tentant désespérément de prévenir le geste inconscient qu’elle s’apprêtait à commettre.
Le trousseau virevolta dans les airs avant d’atterrir dans la paume du basketteur, à qui les antécédents sportifs conféraient des réflexes exemplaires. Et les paroles fatidiques franchirent néanmoins les lèvres de la jeune femme, assurées, injustifiées et provocatrices : « Déplace-la toi-même. »


Dernière édition par Faith Harding le Sam 7 Mai 2011 - 7:17, édité 4 fois
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Message(#) Sujet: Re: “ It's the colour of your skin ” (#9971) “ It's the colour of your skin ” (#9971) EmptyMer 23 Mar 2011 - 3:43

    L’urgence avec laquelle il souhaitait partir révélait de manière peu discrète les sentiments qu’il éprouvait. Sa seule envie était de prendre place à bord de sa voiture et foutre le camp, bien loin et au plus vite. Il ne se sentait pas la force de la confronter. Faith était le genre à n’épargner personne, pas même quelqu’un étant déjà étendu contre le sol. Elle se souciait peu des sentiments, n’en ressentant elle-même aucun- ou du moins, aucun sentiment profond et sincère. Elle devait se douter du mal qu’elle lui avait causé en partant sans un mot, elle devait au moins savoir que cela lui avait fait quelque chose, avec les dizaines et les dizaines d’appels qu’il lui avait passés, il prouvait de nouveau qu’il se souciait d’elle. Malgré cela, elle n’allait pas le laisser s’en aller aussi facilement. Et ce, même si elle savait que son orgueil était à terre, même s’il perdait. C’est d’ailleurs pour cela qu’il avait besoin de partir, car il ne pouvait pas la laisser gagner. Le simple fait d’avoir fait tout ce chemin pour venir à sa rencontre était déjà un geste d’une assez grande lâcheté.
    Elle ne savait rien de ce qu’il avait subi durant cette dernière année. Il avait été délaissé par ses proches, elle y comprise, il s’était mis à nu devant la femme qu’il aimait et avait été rejeté de manière exécrable. Il s’était retrouvé seul, à son anniversaire et même l’alcool qu’il avait bu pour se sentir mieux ne lui avait toujours pas enlevé ce sentiment de vide au creux du ventre. Il était presque mort en perdant pied du haut de la falaise bordant la plage et n’éprouvait même pas un petit soulagement d’être encore en vie. Cet appel, donc, lui avait fait un bien incroyable. C’était idiot, mais le fait de savoir que Faith ne l’avait pas oublié lui avait fait grand bien. Il avait tellement eu besoin d’elle au cours de la dernière année, il avait encore tellement besoin d’elle qu’il était venu à sa rencontre.
    Il voyait maintenant ce geste pour ce qu’il était; une grave erreur. Et pourtant sur le coup, malgré sa colère, il n’avait pu s’empêcher d’aller de nouveau vers elle. Sa présence lui manquait, même si jamais il ne se confiait à elle, le simple fait qu’elle soit à ses côtés le soulageait. C’était le respect qu’elle avait pour lui qui l’aidait, car elle éprouvait du mépris à l’égard de tout le monde. Il sentait qu’il avait une place particulière dans sa vie, il aimait qu’elle ne cherche pas à le comprendre. Il n’avait pas besoin de penser à ce qui n’allait pas lorsqu’il était en la compagnie de Faith, il ne faisait que passer du bon temps. C’était pour retrouver tout cela qu’il avait traversé le pays en trois jours, pour renouer avec le passé; avec ses belles années en Californie. Pourtant, elle n’était pas là à son arrivée et cela avait suffit à lui faire comprendre qu’il n’avait pas envie de subir cet abandon une deuxième fois. La jolie blonde le faisait peut-être se sentir vivant lorsqu’il était avec elle, pourtant, il ne pourrait supporter de la voir partir, encore… Il en avait assez de s’inquiéter, d’imaginer les pires situations lorsqu’elle ne le rappelait pas- il faut dire qu’avec ses agissements, Nate se doutait qu’elle ne partait pas seulement en tournée pour son boulot. Il réalisa tout à fait son erreur en la revoyant, plus confiante et belle que jamais. Elle gagnait et il ne pouvait pas le supporter. Ainsi, il devait partir, au plus vite pour qu’il soit encore possible à Faith de croire qu’il n’était pas venu pour la voir, mais simplement pour la narguer. Qu’il voulait simplement lui rendre la pareille, lui prouver qu’elle n’avait plus aucune influence sur lui.

    Durant le court silence qui suivit, Nate retira son sac de sport de sur son épaule et la posa au sol, ses clés toujours fermement au creux de sa main. Il regardait Faith avec impatience, ennui. Il se doutait bien qu’elle ne le laisserait pas partir si facilement et il redoutait les instants prochains. Elle s’appuya contre sa voiture et il fit un pas en avant, méfiant. Il craignait une égratignure, volontaire ou non, contre la peinture parfaite de la Ford. Elle ouvrit enfin la bouche, elle prenait son temps pour parler. Cela eut pour effet d’augmenter l’impatience du basketteur qui lui lança un regard des plus agressif. Elle lui fit une leçon de politesse qui lui fit lever les yeux au ciel. Qu’est-ce qu’elle essayait de faire, au juste? « Il y a certaines formules à respecter quand on se dit adieu, Hepburn! Ce n’est que lorsqu’on est sûr de se revoir qu’on peut se permettre de partir sans rien dire. » lui dit-elle avec ce qui ressemblait à de la colère dans la voix ou alors, du ressentiment. Il eut un rire froid et croisa les bras. Elle se donnait une excuse, comme si son silence avait une raison bien simple. Elle paru ne pas comprendre son amusement et il se permit une petite explication : « Tu veux me faire croire que t’es partie sans m’adresser un mot parce que tu savais qu’on allait se revoir? Wow, ce n’est pas un peu facile comme excuse, Harding? » Elle ne se soucia pas une seconde de son commentaire et repris son histoire ou enfin, elle la commença.
    Elle le ramenait quatre ans plus tôt, alors qu’ils n’étaient que de simples connaissances. Elle fit allusion à ce qui avait faillit se passer entre eux ce soir-là, ce que Nate tenta de chasser de son esprit-revoir son corps, sentir ses caresses ne l'aiderait certainement pas-puis, termina avec le moment où elle avait conduit la célèbre voiture. Il hocha la tête, un sourire amusé, quoiqu’un peu hypocrite au coin des lèvres. Il se rappelait très bien de la raison pour laquelle elle avait conduit la voiture et maintenant n’était vraiment pas un bon moment pour faire remonter ce souvenir à la surface. « Je suis content que cette expérience ait été agréable pour toi, parce que d’après mon souvenir ce n’était pas par envie que je te prêtais le volant, mais bien parce que je venais d’apprendre que j’avais un demi-frère! » Il avait perdu toute trace de sympathie et s’approcha davantage de la jeune femme. Il posa ses mains sur sa voiture, des deux côtés du corps de Faith et murmura sèchement : « Tu ne t’aides pas du tout, Harding. Alors maintenant, tu vas cesser tes conneries et enlever ton auto de mon chemin, c’est compris? » Il resta dans cette position quelques secondes, l’air assez menaçant. Puis il se recula et remit son sac sur son épaule.
    Il rata, par le fait même, le regard mauvais de Faith. Il relevait tout juste son regard vers elle alors qu’elle annonça : « Je vais enfin te rendre la faveur » Il fronça alors les sourcils, pas trop certain de comprendre le sens de ses paroles. Elle clarifia le tout, puis lui jeta ses clés. Il les attrapa au vol, complètement abasourdi. Il resta un instant à regarder la petite clé métallique, puis il leva de nouveau un regard vers la belle. Elle était parfaitement confiante.

    Nate ne se fit pas prier bien longtemps. Il s’approcha d’abord de sa propre voiture et y déposa son sac de sport. Il referma la porte sans un regard à Faith et se dirigea vers la Mercedes. Il déverrouilla la portière, ouvrit la porte et s’installa dans le véhicule, tout cela en des gestes très lents. Il ne croyait toujours pas qu’il était assis à la place du conducteur. Son regard s’attarda sur la configuration du véhicule, le tableau de bord, la radio et même, le bras de vitesse. C’était si différent de sa voiture. Il était déjà monté dans la Mercedes, sans pourtant porter grande attention à rien, si ce n’est la route devant lui, de peur de faucher quelque chose. Cette voiture n’avait rien de semblable à la sienne. Certes, sa Ford était son petit bijou, mais ce n’était pas une voiture sport. Il ne fit que démarrer l’engin et ressentit une joie inexplicable, comme un enfant le jour de Noël. Il fit ronfler le moteur, simplement pour l’entendre. Il sentait la puissance de la voiture par ce simple pressement de la pédale. L’envie de faire un tour était incroyablement forte et pourtant, en regardant Faith dans l’allée menant à la maison, il savait qu’il ne pouvait pas le faire. Il n’était pas dupe, malgré les apparences. Il savait que ce geste n’était pas totalement désintéressé. S’éloigner de la maison serait une autre preuve de faiblesse et il ne pouvait pas s’y résoudre. Il se sentait déjà assez humilié comme cela. Et pour être honnête, le simple fait qu’elle l’autorise à prendre sa voiture- que ce soit ou non un piège- était une preuve assez grande pour lui. Ce geste, bien que pouvant paraître anodin, montrait la confiance que Faith avait en lui, tout comme son désir de le voir rester. C’était suffisant. Il bougea alors la voiture, de quelques mètres seulement et appuya sur le frein. Il resta quelques instants dans cette position, tentant de contrôler son envie de mettre l’automobile au défi. Il ne résista pas, cependant. Il appuya de nouveau sur l’accélérateur et s’éloigna de la maison.

    Il roula au moins 15 minutes au centre ville de Miami. Il voulait connaître les limites de l’automobile. C’était si rafraichissant d’avoir une voiture réellement puissante entre les mains. Il zigzagua à grande vitesse à travers Miami. Il se fichait bien des conséquences de ses actes, il s’amusait comme il ne l’avait pas fait depuis longtemps. Il écoutait la musique au maximum, se sentant tout puissant. Il finit par revenir et fit grincer les freins en arrivant, pour s’amuser davantage et pour imiter son ancienne colocataire. Il sortit de la voiture, absolument satisfait de ce petit tour. Il se dirigea vers Faith, qui se tenait sur le perron. Lorsqu’il fût près d’elle, il lui tendit les clés. Il la regardait avec une confiance incroyable. Lorsqu’elle finit par reprendre possession de ses clés, Nate se recula d’un pas et reprit la parole. « Donc, après ces formalités, je vais te dire au revoir. Il y a peu de chance pour qu’on se croise de nouveau, alors selon tes dires, je ne peux partir sans un mot… »
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Message(#) Sujet: Re: “ It's the colour of your skin ” (#9971) “ It's the colour of your skin ” (#9971) EmptyLun 4 Avr 2011 - 15:37

« Déplace-la toi-même », l’avait-t-elle défié. Mais ses propres mots, aussitôt prononcés, eurent pour effet de lacérer ses tympans.

La proposition était grandiose; et le témoin perché au deuxième étage de la maison voisine n’aurait jamais pu mesurer son envergure. Pour celui qui ne déchiffrait pas les regards et ne percevait pas les répliques venimeuses, il ne pouvait s’agir que d’une offre anodine, ou encore – scénario d’autant plus risible – d’un service accordé avec galanterie par le jeune homme à la propriétaire de la voiture. Et si le spectateur dissimulé parvenait finalement à épier des bribes de leur conversation enflammée, la friction qu’il devinait dans l’air ne suffisait pas à lui expliquer la majesté de la clé frappée en plein vol par la lumière du jour, ni l’air incrédule et le mutisme confus de celui qui venait de s’en saisir. Assurément, la gravité du sacrifice échappait à ce regard extérieur. Il ne réalisait pas que, sous ses yeux, quatre mots venaient de détruire un pacte silencieux qui ne flanchait pas depuis près de quatre ans.
Oui, la proposition était grandiose – elle l’était beaucoup trop, justement, pour paraître sincère. Évidemment, la cause d'une telle concession se devait d'être empreinte de mauvaises intentions. L'offre devait nécessairement dissimuler une machination quelconque, ou encore être l'objet d'un piège que seul l'esprit calculateur de la jeune femme savait entrevoir. Assurément, si Faith Harding vous tendait la clé de son bien le plus précieux et vous invitait à en disposer selon vos envies, vous étiez tenu de vous attendre au pire, n’est-ce pas? En effet, le contraire était difficilement concevable.
Et pourtant.

Le basketteur n’avait sans doute pas remarqué que la mâchoire de Faith s’était resserrée lorsqu’il avait attrapé la clé de l’inestimable véhicule. Distrait par l’étonnement, il n’avait pas noté la main de Faith qui s’était refermée par réflexe, s’attendant à retrouver dans sa paume la texture familière de l’objet métallique. Ce court moment d’incompréhension, où le regard de Nate alterna entre le trousseau qui reposait dans sa main et la jeune femme qui se tenait devant lui, mit à l’épreuve le sang-froid de cette dernière. Relevant ses yeux vers ceux de Faith, désirant sans doute y trouver la confirmation de ce qu’il croyait avoir entendu, Nate n’affronta que l’habituel stoïcisme de ses pupilles pâles. Il ne releva pas l’appréhension dans son regard livide, ni les ongles qui entaillaient nerveusement la paume de sa main droite. Il ne discerna en effet qu’une confiance factice qui le provoqua instantanément et le fit passer à l’action, ne lui laissant pas le temps de cerner les failles qui fracturaient une à une la contenance de Faith Harding.
Certes, on disait que la jeune femme vouait plus d’estime à la Mercedes qu’elle n’en accordait à la race humaine au grand complet. On avait également entendu parler de son obstination à refuser les clés aux portiers des hôtels les plus luxueux, préférant nettement stationner sa voiture elle-même plutôt que d’avoir à supporter des mains étrangères sur son volant. Mais en cédant le véhicule à Nate elle faisait plus encore que rompre un instant avec la relation possessive et plutôt malsaine qui la liait à sa voiture. Elle lui accordait l’atout immatériel qui entraînait son univers dans une révolution autour de sa personne, et qui en somme contribuait à faire d’elle ce qu’elle était : la maîtrise de la situation.
Il était facile, légitime même, de supposer le pire quand Faith Harding vous octroyait en quelque sorte ce qu’elle possédait de meilleur. Mais il ne fallait pas oublier qu’aux yeux de la beauté scandinave, aucune ruse ne justifiait le fait de renoncer à un contrôle qui lui était vital.
Malheureusement, le plan initial qu’elle avait établi en expédiant le billet à Nate avait souffert d’un contretemps prématuré. Aussi plaisante qu’avait été l’apparition de la Ford noire à l’entrée de la demeure, cela signifiait surtout que son ancien colocataire l’avait devancée : Faith aurait dû comprendre immédiatement qu’au lieu de lui procurer les retrouvailles qu’elle attendait, ce détail allait lui poser problème. Après tout, elle ignorait combien de temps il avait dû patienter au sein de ce quartier de Miami, ravagé qui plus est par une catastrophe naturelle, possiblement en sa présence. En le voyant sortir en coup de vent de la maison, elle était prête – exaltée, même – à l’idée d’affronter un peu de défiance, mais la colère croissante du jeune homme la laissait perplexe. Ce qui la désorientait bien davantage, cependant, c’était la frigidité que Nate exhibait en la revoyant après ses douze mois d’exil : sa détermination à ne pas poser les yeux sur elle si ce n’était pour lui lancer des regards froids ou agacés, ses répliques empressées teintées d’un dégoût non dissimulé, et en somme ce qui semblait être une absence totale d’attirance à son égard. Elle ne participait plus que seule à ce jeu qu’ils avaient mis en scène; le reprendre paraissait être la dernière chose qu’il désirait, ou peut-être en avait-il oublié les règles. Mais le problème était là : il n’avait jamais semblé à Faith que la participation puisse être volontaire. Son corps à elle, sous sa posture sculpturale et ses mouvements maîtrisés, réagissait à chacun de gestes de Nate en dépit de ce que sa volonté aurait pu tenter de lui dicter. Mais elle n’essayait même pas de contester ce magnétisme dans lequel elle se complaisait autant aujourd’hui qu’un an auparavant. C’était précisément ce qu’elle souhaitait retrouver en renouant avec Nate Hepburn : elle désirait reprendre leur liaison obscène (et essentiellement platonique, à ce propos) là où elle l’avait laissée. Ce soi-disant égoïsme, qui en fait n’était qu’une composante innée de la nature de mademoiselle Harding, réclamait des retrouvailles avec le sportif dont elle avait partagé la villa en bord de mer. Celui avec lequel elle aimait boire une bière froide avant que leurs chemins ne se séparent – Nate se dirigeant vers une fête universitaire, Faith allant… Dieu sait où. Aux côtés duquel elle endurait, tout comme lui, un désir physique frôlant la manie, qu’ils vivaient au travers de plaisanteries sarcastiques et de moments inexplicables où ils tiraient quelque chose de positif de leur compagnie respective. Faith ne pouvait pas concevoir que son absence avait eu le pouvoir dissoudre cette relation à laquelle ils semblaient condamnés à perpétuité. Et si la rupture s’était opérée de son côté à lui uniquement, sa condition à elle devenait tout à coup bien moins amusante.
« Tu ne t’aides pas du tout, Harding », avait-il déclaré en emprisonnant le corps de la jeune femme avec ses bras – sans même effleurer sa peau, pourtant – l’empêchant ainsi de se détacher de la carrosserie de la Ford. « Alors maintenant, tu vas cesser tes conneries et enlever ton auto de mon chemin, c’est compris? », avait-il complété dans un murmure acéré. Or, même s’il n’avait pas évité le « regard mauvais » qu’elle lui avait destiné lorsqu’il s’était éloigné d’elle, Nate se serait mépris sur l’origine de celui-ci. Cet air accusateur ne provenait pas d’une affliction quelconque face à sa brusquerie; elle ne l’impressionnait pas, ni ne l’offensait d’aucune manière. Il s’agissait plutôt d’un reproche puisqu’il n’avait pas voulu jouer plus longtemps, ou tout court d’ailleurs. En effet, la menace était peut-être vraiment son unique intention – mais l’impatience de son corps tendu vers elle, et son insoutenable proximité, avait éveillé chez elle un désir cuisant. Un instinct plus déchirant, plus primitif encore, que n’importe quel réflexe de fuite.

La situation aurait été tout autre s’il ne s’était pas appliqué à défaire ses précautions; si, comme prévu, c’était lui qui s’était immobilisé devant l’allée, à bord d’un taxi ou au volant d’une voiture d’emprunt; si c’était elle qui l’avait attendu sur le perron, s’avançant vers lui avec un pas élégant et un sourire lascif. Il aurait été possible de prévenir les dommages. Il n’aurait pas été complaisant, loin de là, mais il suffisait qu’il arrive au lieu d’être en train de repartir, et tout aurait été différent. Toutefois, les faits s’étaient alignés dans un ordre moins opportun pour la jeune femme; et ce renversement de situation commençait à lui filer entre les doigts. Le discours qu’elle ficelait au fur et à mesure dans la seule intention d’accaparer l’attention du basketteur avait connu un effet radicalement contraire à celui qu’elle espérait. Il s’avérait que Nate s’emportait de plus en plus face à chaque mot prononcé par Faith – il aurait trouvé une raison de la blâmer pour n’importe laquelle de ses répliques, aussi pacifique qu’elle fut. Et c’est seulement lorsque Faith arriva à comprendre cette fatalité qu’elle trouva aussi le moyen de retenir Nate, ne serait-ce que pour quelques minutes encore. La seule façon de ne pas perdre le contrôle de la situation, réalisa-t-elle, était de le concéder à Nate.
En effet, en lui abandonnant ses clés, elle lui cédait en même temps l’autorité sur les événements qui allaient suivre. Elle ne le contraignait à rien, ne l’empêchait pas de partir, et ne lui demandait pas de rester. Elle voulait lui donner l’impression qu’il pouvait faire ce qu’il désirait, lui faire comprendre que durant un moment c’est elle qui allait dépendre de sa décision, et non le contraire.
Il avait fallu à Faith quelques secondes à peine pour lever l’interdiction qui veillait sur sa Mercedes depuis des années. Pour décider que faire rester Nate dix minutes de plus valait la peine de lui sacrifier sa voiture. Connaissant Faith, il s’agissait là d’un honneur considérable. Mais soupçonner un piège était tellement plus prudent, n’est-ce pas?

Le démarrage en trombe de la Mercedes noire ne fut pas une surprise pour la blonde restée debout au milieu de l’allée. Évidemment, elle ne s’attendait pas à ce que le basketteur se contente de déplacer la voiture de quelques mètres : sa proposition était ornée d’un sous-entendu bien plus aguicheur. La propriétaire s’était avancée de quelques pas afin de le suivre des yeux alors qu’il disparaissait au tournant de la rue – et un manque inhabituel lui accabla la poitrine. Même si elle résultait de ses propres agissements, de cette proposition faite avec une assurance purement fictive, l’expérience n’en demeurait pas moins un supplice…
Au bout de cinq interminables minutes, Faith commençait déjà à perdre patience. Dix minutes et l’angoisse l’attrapait à la gorge. Quinze et celle-ci semblait s’appliquer à ronger sa peau. Au fond, elle savait bien que la conduite de Nate était exemplaire; elle ne craignait pas non plus qu’il quitte les lieux ainsi, puisque lui-même tenait beaucoup trop à sa Ford malgré tout. Mais elle avait besoin de sa voiture, et le contrôle, lui, lui était indispensable. Elle devait à tout prix s’en ressaisir.

Faith émit un soupir nerveux lorsque la Mercedes se matérialisa enfin sur Lemon Street dans un virage admirable, et montra un sourire sans joie lorsque Nate imita parfaitement sa manière pompeuse de stationner le véhicule. Elle se tenait dorénavant sur le perron, les bras croisés, sa peau de porcelaine plus pâle encore que de coutume, en attendant que Nate referme la portière et la rejoigne devant la maison – quelques mètres plus près du but, c’était déjà ça. La beauté froide tendit une main rigide pour réclamer les fameuses clés, et Nate y consentit avec un air triomphant; mais les paroles qu’il prononça ensuite furent beaucoup moins conciliantes. « Donc, après ces formalités, je vais te dire au revoir. Il y a peu de chance pour qu’on se croise de nouveau, alors selon tes dires, je ne peux partir sans un mot… », annonça-t-il en reculant d’un pas, espérant ainsi clore la conversation.

Il s’était déjà retourné et s’apprêtait à se diriger vers sa propre voiture, quand la voix impérieuse de Faith l’arrêta net: « Que fais-tu ici, Nate? »
Il s’était immobilisé, en entendant son prénom peut-être : jusque-là, ils s’étaient bornés à ne faire l’usage que de leurs noms de famille respectifs. La question était soudaine, et Faith ne s’attendait pas à une réponse immédiate. Mais elle insista : « Tu ne t’es pas rendu jusqu’à Miami pour formaliser nos adieux, il me semble. Alors qu’attendais-tu de moi? » Nate s’était retourné vers elle, lui faisant face à nouveau. « Je viens de t’offrir tout ce dont il a jamais été question entre nous. L’adrénaline. La liberté. La délivrance. Et surtout, pas de comptes à rendre. » Elle lui avait parlé d’un ton didactique qu’elle employait peu souvent, et qui pour cette même raison imposait le respect. Mais peu à peu, le sarcasme regagnait sa voix, lui conférant cet écho détestable qui lui allait comme un gant. « Je n’ai pas changé en une année, Nate. Et ça, j’ai l’impression que tu le savais. Tu es venu me voir pour une raison… » Puis, avec un sourire froid, elle lui renvoya la question qu’elle lui avait posée au téléphone, une semaine plus tôt : « … alors à quoi bon repartir, Nate Hepburn? »

La dernière fois qu’elle avait été mise sur le tapis, tout ce que Faith avait obtenu en guise de réponse avait été la tonalité sourde de l’appareil. C’était peut-être mauvais signe.



« Il ne peut plus supporter ma présence. Je suis sans doute peu humain[e], mais est-ce une raison? »
Samuel Beckett, « En attendant Godot »

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Message(#) Sujet: Re: “ It's the colour of your skin ” (#9971) “ It's the colour of your skin ” (#9971) EmptyVen 6 Mai 2011 - 7:16

    C’était la deuxième fois qu’il abandonnait tout ce qu’il connaissait, qu’il quittait sa demeure avec sa voiture et traversait le pays. Les deux fois, il s’agissait d’un geste impulsif, presque incontrôlé. À 15 ans, il avait fui la maison familiale, atteint par une colère noire contre son père. Il avait parcouru illégalement les États-Unis, ne possédant pas encore son permis et ce, dans la voiture qu’il devait recevoir pour son sixième anniversaire quelque six mois plus tard. Lorsqu’il était arrivé en Californie, il avait cru y rester toute sa vie. Son rêve était de jouer pour les Lakers après tout et il y avait quelque chose avec la ville de Los Angeles qui lui plaisait énormément. Pourtant, le voilà un peu plus de six ans plus tard, quittant une seconde fois sa vie. Installé dans la même voiture, il ne ressentait plus l’excitation qui l’avait d’abord poussé à quitter sa famille. Ce qui l’emmenait vers la Floride était son impulsivité, mais le sentiment qui l’animait n’était pas la rage ou le désir de liberté. Ce qui l’éloignait de la Californie était plutôt le désespoir. Il ne se sentait plus la force de rester dans cette ville après y avoir tout perdu; amis, amour et rêve. Il bougeait la tête, au rythme de la musique et tapotait le volant d’un même mouvement depuis des heures, maintenant. Quelque chose se passait, lorsqu’il se laissait emporter par la musique qui éloignait tout ce qui n’allait pas bien. C’est un peu comme si ses pensées s’envolaient; sa tête se vidait et il ressentait alors un bien-être incroyable. Il n’y avait rien d’autre que la route devant lui et les sons de guitares et de batterie qui lui déchiraient les tympans. Une sensation absolument merveilleuse, l’éveil de quelque chose au creux du ventre qui donnait de la force. Évidemment, il allait devoir affronter la situation bientôt, mais ce moment de liberté, d’abandon, était ce qu’il lui fallait. Il roulait depuis près d’une heure sur le territoire du Texas lorsque la musique s’arrêta net, en plein milieu d’un solo de guitare particulièrement intense. Il n’avait qu’une dizaine de disques dans sa voiture et celui qui jouait était son favoris, c’était la compilation qu’il avait fait il y a bien longtemps de cela pour son petit road trip avec Faith. Le jeune homme n’était pas la personne la plus délicate avec ses affaires et ce cd en avait subi des affronts. Et comme Nate l’écoutait depuis son départ, environ onze heures plus tôt, il n’était pas surprenant qu’il se brise. Ce silence pesant, toutefois, lui serra le ventre. Il se déplaça sur le côté de la route et arrêta le moteur. Il regardait autour de lui et ne voyait rien du tout. Il se trouvait seul, au milieu de nulle part et regrettait amèrement d’être parti. Il ne se sentait plus la force de continuer, il ne savait pas ce qu’il allait bien pouvoir dire à son ancienne colocataire lorsqu’il la verrait. Il n’était même pas certain d’avoir envie de la revoir. Il resta là de longues minutes, indécis. Il luttait contre sa faiblesse, aussi fort que possible. Il n’avait plus rien à espérer de la Californie et même s’il attendait beaucoup de sa destination, Nate savait qu’il serait affreusement déçu. Il s’assoupi et se fit réveiller par un policier qui, au beau milieu de la nuit, venait lui demander de dégager du bas-côté de la route sous peine d’amande. Sans vraiment avoir pris de décision, le jeune homme continua sa route, mettant un autre cd dans le lecteur et faisant de son mieux pour faire le vide dans sa tête.

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    Il venait de se retourner et commençait à s’éloigner. Dès qu’il avait redonné les clés à Faith et qu’il avait lancé sa réplique-dont il était plutôt fier- il avait eu à se dégager de son emprise. Il avait à s’en aller, au plus vite avant de perdre cette contenance. Il ne se savait pas autant de volonté, il n’avait jamais cru pouvoir résister à la jolie blonde. Certes, dans leur innombrables jeux, ils avaient été porté tous les deux à refuser les avances de l’autre, mais jamais Nate aurait cru avoir la force de partir pour toujours. Il devait se contrôler pour ne pas revenir sur ses pas et retourner vers elle. Il avait dû tout faire pour ne pas écouter les plaintes de son corps à l’approche de celui de Faith. Il n’avait jamais ressenti désir plus grand qu’en cet après-midi. Il devait se battre pour ne pas se laisser atteindre, pour résister à l’envie de la toucher, de la serrer. Penser à autre chose, éviter le plus possible de la regarder et alimenter sa colère, voilà les moyens qu’il avait trouvés pour s’empêcher de succomber. Il marchait, tentant le moins possible de paraitre crispé et pressé, son visage exprimait une incompréhension douloureuse. Il en voulait à la belle Harding, il était en colère mais il ne parvenait pas à comprendre ce qui le faisait s’éloigner ainsi. Tout cela pour ne pas paraître faible, pour la narguer? Il était véritablement sur le point de partir et s’il le faisait, jamais plus il ne pourrait reprendre contact avec elle. Est-ce qu’il ne valait pas mieux lui demander les explications qu’il cherchait tant? Il ne savait pas s’il pourrait lui pardonner, il avait peur de souffrir de nouveau et c’est pour cela qu’il s’éloignait. Or, voulait-il vraiment partir?

    Il s’arrêta net en entendant les mots de Faith : « Que fais-tu ici, Nate? ». Un sourire franchit ses lèvres, un sourire fugace qu’il perdit immédiatement. Le fait qu’elle l’arrête, cela lui laissait la possibilité d’arranger les choses, peut-être. Cependant, il n’avait toujours pas décidé de ce qu’il voulait et s’il retournait vers elle, c’était assuré qu’il ne repartirait pas de sitôt. Il resta immobile de longues secondes et elle se remit à parler. Elle avait raison, bien sûr, il n’était pas venu ici pour lui dire au revoir en personne. Mais il ne savait pas non plus pourquoi il était là. Il se retourna et écouta le reste de ses paroles : « Je viens de t’offrir tout ce dont il a jamais été question entre nous. L’adrénaline. La liberté. La délivrance. Et surtout, pas de comptes à rendre. » Il croisa les bras, pour se protéger plus que pour avoir l’air indifférent. Il ne bougea pas, il ne pouvait pas s’avancer vers elle. Ils se parlaient rarement sur ce ton, leur conversation n’étant jamais sérieuse. Il était seulement perturbé et surtout, indécis. La voix de Faith repris un peu de ce sarcasme qui lui allait si bien et elle enchaîna, lui redemandant indirectement les raisons de sa visite. Puis, elle lui redit cette phrase qu’il avait déjà entendit et qui l’avait aveuglé de rage : « alors à quoi bon repartir… » S’il l’avait laissé parler, s’il avait réussi à contrôler son envie de lui couper la parole afin de lui laisser une chance, c’en était assez.

    « Il vaut mieux repartir, plutôt que de fréquenter quelqu’un comme toi ». Ces mots lui avaient échappés, il les avait crié parce qu’il avait besoin de lui dire une fois pour toute ce qu’il ressentait. Il voulait des réponses, il voulait savoir pourquoi. Elle ne parut pas choquée, quoiqu’il semblait y avoir quelque chose qui tirait ses traits et lui donnait une expression différente, une expression qu’il n’avait jamais vue chez elle. Il serra les mâchoires, il voulait se calmer. Une voisine était sortie de chez elle afin de savoir ce qui se passait. Pour éviter d’avoir un public, le jeune homme se rapprocha d’elle. « Je suis revenu pour comprendre Faith, parce que honnêtement, j’y arrive pas ». Il avait volontairement prononcé son nom, parce qu’il ne voulait plus se montrer distant, ni même paraitre froid. Il voulait être honnête, il voulait qu’elle sache. Certes, sa voix était teintée d’agressivité, mais il était également sincère. Il garda le silence quelques secondes, croyant que la demoiselle allait répliquer. Son silence l’irrita et il secoua la tête, se trouvant idiot d’avoir cru qu’elle lui dirait la vérité. Elle n’allait pas se mettre à nue devant lui, elle ne le ferait jamais. « C’était facile de laisser un mot, me dire de ne pas t’attendre. Est-ce que tu as la moindre idée de ce que j’ai pu ressentir Faith en ne te voyant pas revenir. Tu ne répondais pas à mes appels, tu as complètement disparu… Je me suis imaginé les pires scénarios, je pensais que t’étais peut-être morte quelque part. J’avais peur Faith, peur qu’il te soit arrivé quelque chose. Et toi trop égoïste pour t’en soucier, tu as gardé le silence. T’as foutu le camp, tu m’as complètement abandonné. Parce que ouais, j’ai été assez stupide pour croire qu’on était amis… » Il eut un rire sans joie, regarda le sol et enchaina. « Donc j’en ai assez de jouer, j’ai déjà donné. Il n’est pas question que je reste et que tu me refasses le coup. J’avais besoin de toi, j’ai eu la pire année de ma vie et t’étais pas là pour moi. Alors je suis désolé si tu pensais récupérer ton jouet, mais c'est trop tard. T'as foiré. »
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“ It's the colour of your skin ” (#9971) Vide
Message(#) Sujet: Re: “ It's the colour of your skin ” (#9971) “ It's the colour of your skin ” (#9971) EmptyLun 27 Juin 2011 - 4:28

I've never seen you when you're smiling
It really gets under my skin
You say it's easy when it's faster
I still can't guess what you're after
It's the colour of your skin
Your skin is black metallic

2010
Il s’agissait, encore une fois, de la même histoire : Faith Harding venait de rentrer de l’une de ses mystérieuses escapades nocturnes à une heure avancée du matin – Nate Hepburn, lui, s’était levé depuis bien longtemps déjà. La baie vitrée de la villa en bord de mer était noyée par le soleil californien, en dépit de la matinée précoce et de ce qu’on appelait la saison froide dans les états moins bien situés. La mannequin légèrement vêtue se tenait debout derrière la vitre, agrippant comme de coutume une bouteille d’alcool dans une main, et son regard s’égarait vers la plage que surmontait la demeure – où Hepburn s’élançait en courant le long de sa trajectoire fétiche.
La jeune femme sourit en suivant des yeux son colocataire qui, torse nu, bordait l’océan à la course – et il lui fallut peu de temps pour décider d’interrompre son jogging quotidien. Elle se glissa à l’extérieur par le vitrage entrouvert, et entreprit aussitôt de descendre la falaise sur laquelle était perchée leur villa. L’exercice s’avérait d’autant plus acrobatique avec la bouteille qui la privait de sa main gauche, mais la nymphe parvint à fouler le sable avec seulement quelques éraflures sur ses jambes élancées. « La vue est très plaisante de là-haut », lança-t-elle à l’intention de Nate, qui avait justement rebroussé chemin et courait à présent dans sa direction. Faith porta une main à son front pour protéger son regard du soleil tenace, et suivit ainsi le parcours du basketteur, exhibant un sourire moqueur à son intention. Celui-ci semblait exténué lorsqu’il fut parvenu à sa hauteur. Il passa la main dans ses cheveux trempés, avant de se laisser tomber dans le sable avec un soupir satisfait. Faith ne tarda pas à s’asseoir à ses côtés, étalant devant elle ses jambes fines et sculptées, rehaussées par la lumière. Nate jeta un regard en biais à sa colocataire. « La vue n’est pas mal d’ici non plus », avoua-t-il après avoir repris son souffle.
Elle lui présenta sa bière, qu’il déclina d’un sourire amusé. Il ne se borna pas à lui expliquer que l’alcool n’était pas exactement la boisson suggérée lorsque l’on conseillait l’hydratation pendant le sport. Il lui parla en revanche du match décisif qui l’attendait en soirée, et s’anima lorsqu’il dévia ensuite vers l’attitude décevante de quelques-uns de ses coéquipiers. Pendant ce temps, Faith s’était étendue de tout son long sur la surface brûlante. Les rayons glissaient sur sa peau dénudée, que rien ne couvrait sinon des shorts en jean révélateurs et un haut de maillot noir qui épousait sa poitrine – mais ils s’acharnaient en vain, ne parvenant pas à imprégner de hâle sur sa peau de porcelaine. Nate était bien conscient que sa colocataire ne vouait pas un intérêt soutenu à ce qu’il était en train de raconter – elle semblait étrangement silencieuse ce matin-là, d’ailleurs – mais sa présence passive sembla le rasséréner quelque peu. De son côté, allongée ainsi sur le sable, Faith se contentait de détailler furtivement le jeune athlète qui lui tenait compagnie. Elle appréciait le teint basané de son dos habitué au soleil tapant, les muscles fuselés que lui octroyait son entraînement religieux, son expression déterminée et son visage enflammé par l’effort. Lui aussi était pratiquement couché, à présent, mais ses bras le soutenaient afin de lui permettre de garder un œil sur la plage. Le soleil, de plus en plus éblouissant, lui faisait froncer les sourcils et balayait ses cheveux désordonnés – et Nate continuait de parler, ses lèvres étirées en ce demi-sourire qui le caractérisait tant : à la fois irrésistible et insouciant…
Ce fut la dernière image que Faith conserva de Nate Hepburn.
La jeune femme se releva lentement, les grains de sable se déversant de sa chevelure blond pâle. Sans prévenir, suivie du regard surpris de son colocataire, elle fit quelques pas vers le chemin du retour. « Bonne chance pour le match! », s’exclama sa voix sombre alors qu’elle s’éloignait, « Ce soir, on fêtera ta victoire! » Sur ces mots, elle se tourna rapidement vers Nate, sa chevelure se renversant sur son épaule. Elle lui fit un clin d’œil et se retourna aussitôt, poursuivant sa marche à travers le sable blanc.
Plus tard, Nate allait se rappeler de cette vision comme de son dernier souvenir de Faith Harding.


***

Il était près de dix heures du soir, et le match de basketball – opposant dans un combat décisif les UCLA Bruins aux Temple Owls – battait son plein. La foule de spectateurs se compressait sur les estrades du gymnase, les yeux rivés sur la balle qui survolait le terrain d’un bout à l’autre avec une vitesse éblouissante, prêts à scander à chacune des passes spectaculaires que s’échangeait l’équipe locale.
Au même moment, la silhouette de Faith Harding s’arrachait à la nuit oppressante, qui semblait avoir frappé la Californie bien tôt, ce soir-là. Bien loin de prendre part à l’engouement des spectateurs transis, la jeune femme paraissait s’adonner à une autre de ses expéditions solitaires à travers les rues endormies de Los Angeles. Elle déambulait le long d’une rue industrielle où s’alignaient des usines à l’air morne, les mains dans les poches de son jean usé. Elle marchait lentement, et sa peau laiteuse se fondait difficilement avec l’obscurité complète de la rue dépeuplée. Les lettres blanches cousues au dos de sa veste en cuir détonnaient contre le paysage lugubre : ainsi, le mot « revenge » s’inscrivait dans la pénombre, poursuivant à travers les ténèbres le corps pâle de la nymphe.
Il régnait, ce soir-là, une complicité inégalée entre les joueurs de l’université de Californie. Certes, les Owls formaient une excellente équipe – une équipe crainte de part et d’autre du pays, même – mais l’égoïsme de ses joueurs était tel qu’il freinait souvent leur course. L’unité des Bruins, en revanche, faisait naître une chorégraphie exaltante, qui déjouait avec malice l’agressivité de leurs adversaires. De temps à autre, les spectateurs surprenaient des sourires entendus échangés d’un joueur à l’autre, lorsqu’ils parvenaient ensemble à dérober le ballon d’un attaquant solitaire.
Elle savait très bien qu’elle n’était plus seule. Elle pressentait ces vautours qui la traquaient depuis une centaine de mètres, elle entendait le bruissement des corps qui la talonnaient et voyait leurs spectres se dessiner sur les façades de béton… Mais elle était d’une telle arrogance! Son pas, à défaut de s’accélérer, demeurait obstinément mesuré; puisque, selon ses propres lois, la prestance devait toujours l’emporter sur la prudence. Elle avait attendu des visiteurs, cette journée-là, du genre qui se plaisaient justement à être inattendus – et ils s’étaient enfin rendus jusqu’à elle, ces insectes traînants qui grouillaient dans l’obscurité et se tortillaient à ses chevilles quand elle avait le dos tourné. C’était l’approche habituelle des scélérats et des traîtres.
Ce n’était une surprise pour personne : Nate Hepburn maniait le ballon avec une agilité remarquable, entraînant son équipe de plus en plus près de la victoire avec chaque enjambée. À défaut d’être capitaine, le numéro 23 demeurait l’un des meilleurs atouts des Bruins, et cela se voyait à sa façon de se démener sur l’aire de jeu – comme si, au cours de ces douze minutes que comptait chaque période, il n’existait qu’au sein des limites de ce terrain sacré. Le dernier quart était justement sur le point d’être annoncé : les attaquants de chaque équipe se faisaient face, prêts à bondir à la première occasion, quand le coup de sifflet résonna à travers le stade. L’arbitre projeta le ballon dans les airs, et tous les regards se relevèrent vers l’objet qui, durant une seconde, sembla être en suspension totale au cœur du gymnase fébrile. Avant qu’il ne s’élance vers le ballon qui entamait sa chute vers les mains brûlantes, Nate Hepburn reçut une tape sur l’épaule en guise d’encouragement.
Faith Harding sentit une main lui frôler l’épaule. Elle s’était prêtée, jusque-là, au jeu de cette filature silencieuse, mais ce contact, furtif mais pressant, mettait fin à cette poursuite à distance. On ne la suivait plus : on s’affairait maintenant à la retenir, on la sommait ainsi de s’arrêter. Or, lorsque Faith fit volte-face afin de braver l’imposteur, son regard ne fit que balayer le paysage inerte. Elle crut entendre son prénom, faiblement prononcé par une voix ténébreuse, mais l’intrus semblait avoir été avalé par la noirceur dont se couvraient les brigands. Il n’y avait que le trottoir désert et la route inoccupée, il n’y avait personne, personne d’autre qu’elle et sa beauté macabre. Elle aurait dû être intouchable. Mais elle n’était pas dupe. Et elle ne montra aucune surprise lorsque l’on agrippa ses poignets – seule la douleur lui fit serrer la mâchoire lorsque l’on tordit ses bras derrière son dos pour l’empêcher de bouger. « Faith Harding » – cette fois, son nom fut prononcé d’une voix forte et pompeuse, alors que les traits d’un homme, un autre, se matérialisaient devant elle. Combien étaient-ils? Combien devaient-ils être pour s’assurer de maîtriser une jeune femme de vingt-et-un ans? Mais sa réputation outrageuse devait la suivre. Après tout, on disait qu’elle était intouchable...
Il la fixait avec un œil triomphant qui donnait la réplique à l’aversion placide de la Norvégienne; car celle dernière, malgré sa captivité, gardait son territoire avec une fierté acharnée. « Si vous osez me toucher aujourd’hui », siffla-t-elle justement d’une voix hautaine qui transperça la nuit, « vous mourrez assurément demain. » Il s’agissait d’un slogan qu’elle ne réservait qu’à ses plus persistants détracteurs, et un sourire mauvais décora ses traits malgré la douleur qui élançait ses muscles. Mais la menace ne sembla pas ébranler l’homme aux yeux noirs. « Ne tue pas le messager, Faith… », répliqua-t-il d’une voix mielleuse. « Je ne fais que transmettre les meilleurs vœux de ton père. » Elle aurait dû être intouchable. Mais elle n’eut que le temps de lui lancer un regard dédaigneux avant que le premier coup de poing ne lui déchire l’abdomen.
La vie suivait son cours sur le terrain de basket. Il ne restait que deux minutes au match, et les spectateurs locaux savouraient d’avance la victoire de leur équipe fétiche. Mais les Bruins ne négligeaient pas leur jeu malgré tout : quelques minutes d’inattention étaient suffisantes pour donner aux Owls le temps d’égaliser le score, d’autant plus ceux-ci jouaient à présent avec un désespoir féroce. Un joueur californien s’était emparé du ballon qu’il avait intercepté près de son propre panier, et longeait maintenant à la course les trente mètres du terrain. Il fit une passe calculée à Hepburn, qui, sous les acclamations des estrades et l’éclairage des projecteurs, fusa à son tour vers le panier adverse, usant de feintes habiles pour faciliter sa trajectoire. Vingt secondes au compteur.
« Hé bien, les rumeurs sont fausses! », ricana la voix de l’agresseur. « Il s’avère que tu as un cœur… Décidément, Faith Harding, ta réputation est surfaite! » Il désigna de la tête le sang qui perlait aux lèvres de la beauté pâle, qui filait le long de son menton et tachait sa chemise blanche de gouttelettes noirâtres. Ce sang lui était remonté à la gorge sous l’impact des coups violents qui martelaient son ventre, et elle s’en était étouffée pendant qu’on la frappait, tentant tant bien que mal de recracher le liquide âcre sur le trottoir. Elle se serait écroulée sur le sol si ce n’était des mains qui la forçaient à se tenir droite, et à présent qu’on lui accordait un semblant de répit, le visage de Faith était inexpressif; sa respiration, obstruée par son propre sang, demeurait rauque et douloureuse; mais son regard résigné ne quittait pas celui de l’homme qui lui faisait face. L’identité de ce dernier lui était inconnue – il n’avait même pas daigné se présenter avant d’entamer son travail de tortionnaire – mais son nom lui importait peu; car, dans l’état second où l’instinct de survie l’avait confinée, c’était les traits de son père qui apparaissaient devant elle. Ainsi, à travers la douleur qui faisait vaciller sa vision, ce fut Alexander Harding qui s’approcha d’elle avec un sourire hautain. Ce fut lui qui, sur un ton impérieux, lui ordonna de quitter le pays si elle tenait à sa vie. Et ce fut son père qui prit un élan et lui infligea un énième coup dans les côtes.
Le gymnase avait explosé en un tumulte d’acclamations : Nate Hepburn venait de clore le match en beauté en marquant un but spectaculaire à la toute dernière seconde. Ses coéquipiers l’encerclaient à présent, échangeant des félicitations et des cris victorieux, et Nate partageait leur enthousiasme, un sourire éclatant aux lèvres. Il avait les cheveux en bataille, la sueur ruisselait sur son visage, et à cet instant précis, il était plus heureux qu’il ne l’avait été depuis des semaines. Il s’agissait de son moment de gloire.
Il n’y avait plus personne dans la rue industrielle que baignait la pénombre. Personne, excepté le corps d’une jeune femme à la peau opaline, étendu sur le ciment froid. Ses cheveux étaient maculés de terre et de sang, ses yeux étaient fermés et sa respiration était à peine audible. Le silence qui l’entourait était déchirant. Et pourtant, dans les soirées mondaines, auprès des comptoirs de bars huppés, on disait qu’elle était intouchable…


***

Le corps brisé de la nymphe apparut, chancelant, au tournant de l’allée menant à la demeure. Le match « Owls VS Bruins » était terminé depuis de longtemps déjà, tout comme l’était la fête qui avait suivi la victoire de l’équipe californienne. La nuit était donc très avancée : au cours de ces longues heures où Faith était demeurée allongée sur le trottoir, incapable de rassembler l’énergie nécessaire pour se lever, aucun véhicule n’avait daigné parcourir la voie isolée, et aucun passant ne s’était hasardé à emprunter cette rue glauque. Elle avait perdu connaissance à plusieurs reprises entre ses tentatives pénibles – et acharnées – de se relever, mais vint un moment où elle y parvint, piquée d’une douleur atroce. Le trajet avait été interminable : sa Mercedes noire, qui l’attendait devant la villa, n’avait pu lui être d’aucune aide, et elle avait dû parcourir les quelques kilomètres en marchant, en dépit des lésions sur ses côtes et du supplice dont l’affligeait son estomac. On retrouvait bien là son obstination : il aurait été tellement plus raisonnable, pourtant, de dériver de sa trajectoire pour trouver de l’assistance… C’était sans compter le fait que la fierté restait profondément ancrée en elle, malgré ce qu’un instinct de survie quelconque avait à y redire.
Faith jeta un œil hésitant à la Ford garée à quelques mètres de là, ainsi qu’aux fenêtres faiblement éclairées de la villa. Nate était rentré, de toute évidence, mais l’absence de bruit dans la maison lui permettait d’espérer ne pas le croiser. Elle fit tourner sa clé dans la serrure, et ses doigts ensanglantés s’emparèrent de la poignée : il lui fallut faire appel au peu de force qu’il lui restait pour parvenir à pousser la porte d’entrée. La jeune femme fut d’abord soulagée de constater que le couloir était vide – mais elle se figea dès qu’elle perçut un bruit de pas descendant les escaliers, puis la voix d’un Nate quelque peu éméché qui l’appelait à travers le couloir. Elle jeta un œil furtif au miroir posé contre le mur du vestibule, et s’en détourna aussitôt : ses cheveux blonds lui collaient au visage, ses vêtements étaient sales et trempés, et son propre sang recouvrait sa peau blafarde… Jamais n’aurait-elle laissé Nate la voir dans un tel état. Jamais n’aurait-elle laissé quiconque, d’ailleurs, la percevoir autrement qu’en tant que « Faith Harding », ce personnage qu’elle avait façonné avec la plus grande finesse. Et, à ce moment-là, dépouillée de toute pensée rationnelle par la douleur qui la dévorait, insensible à la plus noire des émotions humaines, elle n’était plus que le spectre de cette personne-là.
Elle ferma en coup de vent la porte de sa chambre, quelques secondes à peine avant que Nate ne s’y arrête. « Alors, Harding, ta proposition tient toujours? J’espère que t’es prête à boire un coup en l’honneur de notre victoire! À toi de choisir : vodka ou whiskey? », l’interrogea-t-il d’une voix joviale de l’autre côté du mur. Le simple fait de respirer était une activité éprouvante pour la jeune femme, et elle dut faire un effort considérable afin de produire un son intelligible. « Pas aujourd’hui, Nate », réussit-elle à articuler d’un ton faible et enroué, dont l’anomalie n’échappa pas au jeune homme. Il hésita quelques instants, puis osa lui poser la question: « Faith… Y’a quelque chose qui va pas? » Une voix toujours aussi diluée lui fit écho : « Ne sois pas ridicule, Hepburn. Maintenant, laisse-moi seule. On trinquera demain. » Debout au milieu de la chambre, Faith attendit que Nate s’éloigne. Cela prit un certain temps : elle pouvait sentir sa présence près de la porte et deviner sa main indécise suspendue au-dessus de la poignée, mais elle savait bien qu’il allait finir par se plier à leur accord tacite. Il ne lui posait pas de questions parce qu’il était conscient que cela allait la froisser; et elle ne donnait jamais d’explications parce qu’elle savait qu’il ne voudrait pas réellement en connaître les réponses… Ainsi, après une minute ou deux, elle l’entendit rebrousser chemin – et, ayant épuisé l’énergie dont elle dépendait pour maintenir sa contenance, Faith s’effondra sur le sol de sa chambre.

Le lendemain matin, Nate ne s’étonna pas de ne pas trouver la jeune femme chez lui, malgré la promesse qu’elle lui avait faite la veille – ce n’était rien d’autre que du Faith tout craché. Deux semaines plus tard – bien qu’un peu irrité – il ne s’alarmait toujours pas de son absence, habitué aux activités nomades de sa colocataire. Un mois passa et il fut agacé par sa résolution à ne pas répondre au téléphone, mais il espérait toujours la voir réapparaître du jour au lendemain, oubliant évidemment de justifier sa disparition. Il lui fallut patienter près de deux mois avant de se rendre à l’évidence : Faith Harding ne reviendrait pas.


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Un silence pesant s’installa entre les deux jeunes gens lorsque Nate eut terminé de parler. Des mots comme ceux qui venaient de frapper l’air n’avaient jamais été échangés entre les anciens colocataires, qui ne s’aventuraient jamais plus loin que les sous-entendus douteux et les reproches déguisés de moquerie. Ils évitaient soigneusement toute réflexion au sujet de leur relation étrange, et jamais ils ne s’avouaient des vérités qui auraient pu la compromettre. Ainsi, le cadre qu’ils présentaient – Nate qui baissait le regard, Faith qui restait sans voix – était tout sauf coutumier. Ils venaient de pénétrer dans une zone inconnue, une zone interdite, et chaque pas qu’ils y faisaient semblait à la fois impulsif et extrêmement maladroit.
L’expression de Faith était impénétrable. Il aurait été ardu de deviner l’effet que le discours de Nate avait produit sur elle, ou de découvrir si ses remarques l’avaient un tant soi peu blessée. Mais le mutisme soudain qui avait scellé ses lèvres, alors qu’elle avait été si volubile avant cet instant, ne devait pas être mépris pour un manque de choses à dire. Au contraire, elle devait lutter pour ne pas laisser les mots se déverser, pêle-mêle, au visage de Nate. Nate qui, cela se voyait, n’en pouvait plus de ce silence angoissant – il souhaitait avoir une réponse, quitte à obtenir n’importe laquelle. Un dernier mot, simplement, pour en finir avec tout ça…

Mais la réaction de Faith risquait de lui plaire encore moins que ce à quoi il se préparait.

« … Qui t’a dit que nous étions amis, Nate? », prononça-t-elle dans un murmure confus. Elle fronça les sourcils, et lança un regard déconcerté à son ancien colocataire. Mais l’embarras qui troublait ses pupilles ne tarda pas à se préciser; et ce n’est pas un sentiment d’incertitude que l’on y retrouva, mais bien la présence d’une colère ascendante. « Qui t’a fait croire que tu pouvais compter sur moi? » Elle avait haussé le ton, attisant de ce fait la rage qui faisait trembler ses doigts. « Qui t’a donné le droit », avait-elle presque crié, « de t’inquiéter pour moi? »
Le désarroi dansait dans ses yeux livides alors qu’elle enchaînait, cassante : « Je t’interdis d’avoir besoin de moi, Hepburn. Parce que j’ai des nouvelles pour toi : il viendra un jour où il m’arrivera quelque chose. Et ce jour-là, mon égoïsme » – elle eut un sourire chargé de sarcasme – « m’empêchera de composer un mot d’adieu. »
Elle ne pouvait plus freiner ses paroles, à présent – même si, par moments, sa voix tanguait et menaçait de s’éteindre. « Je suis une personne abominable, sur ce point-là tu as tout à fait raison. Et il était temps que tu me tournes le dos. Tu prendrais enfin une décision sensée en me disant adieu. » Elle croisa les bras, possiblement sous l’effet d’un mécanisme d’autodéfense – car l’indignation de Nate lui apparaissait maintenant sous un jour tout autre. En effet, la blonde aurait juré, jusque-là, que toute cette scène avait été causée par une question de fierté et d’humiliation, et qu’il se battait pour son orgueil. Elle était convaincue qu’il lui en voulait parce qu’il avait honte : honte de l’avoir attendue durant des mois, honte de l’avoir appelée à plusieurs reprises, honte d’avoir flanché ainsi en acceptant de se rendre à Miami. Mais elle venait de comprendre que sa colère tenait d’un véritable affront à sa personne, et cela la troublait. Il lui avait semblé, pourtant, qu’il était bien le seul à pouvoir supporter sa nature… et le fait qu’il la reniait aujourd’hui fracassait son assurance et ponctuait d’hésitation chacune de ses paroles. Avec chacune de ses répliques, malgré leur sincérité tranchante, elle avait l’impression désagréable de tituber sur des lames acérées.

« C’est justement pour ça », avoua-t-elle donc dans un soupir, « que je ne peux pas te révéler les raisons de mon absence. Si tu savais… tu partirais alors sans te retourner et ne réalises-tu pas » – sa voix se brisa et elle termina sa phrase dans un murmure agressif – « merde, ne réalises-tu pas que je suis en train de faire n’importe quoi pour que tu ne partes pas? »

Elle se plongea de nouveau dans un long silence, que le jeune homme n’osa pas interrompre. Lorsqu’elle reprit enfin la parole, ce fut une voix apaisée et mélodieuse qui glissa hors de ses lèvres enflammées. « Reste au moins ce soir, Nate. Tu reprendrais la route demain matin. Tu pourrais me raconter ce qui t’est arrivé l’année dernière, si tu veux. Et on pourrait boire un coup à la victoire des Bruins », termina-t-elle avec un sourire qui avait quelque chose de mélancolique.

Sur ces mots, elle tourna les talons et s’engouffra dans sa nouvelle demeure, laissant la porte ouverte derrière elle, alors que Nate restait immobile sur le perron. La toiture de la maison était complètement en ruines; sa façade, auparavant impeccable, souffrait de cicatrices encore fraîches; mais il était libre d’entrer, si seulement il le désirait…



I think of you when you're sleeping
Of all the secrets that you're keeping
You can't stay all day under the covers
'Cause under there you'll discover
It's the colour of your skin
Your skin is black metallic
You're turning black metallic…

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Message(#) Sujet: Re: “ It's the colour of your skin ” (#9971) “ It's the colour of your skin ” (#9971) EmptyMar 5 Juil 2011 - 17:41

    Il ne comprenait pas. Il n’avait aucune idée de ce qui venait de se passer. Après lui avait crié des paroles extrêmement blessantes, la jeune femme avait paru se soucier de lui. Ou du moins, elle avait terminé son discours en l’invitant pour la nuit. Nate ne l’avait pas encore suivi, il était encore indécis. Il ne comprenait pas la réaction de Faith, il ne saisissait pas bien ce qu’elle ressentait. Il la trouvait pourtant différente. Il faut dire qu’il n’avait pas l’habitude de se sentir apprécié, de se sentir utile lorsqu’il était question de mademoiselle Harding. Il n’avait jamais réellement su si elle le considérait comme un ami ou non, jamais jusqu’à maintenant. Il n’avait pas envie d’entrer, par orgueil oui, mais aussi parce qu’il n’était pas convaincu que fréquenter Faith de nouveau était bon pour lui. Sa disparition était l’une des choses qui l’avait fait tant souffrir l’année précédente et elle risquait de lui refaire le coup, sinon pire. Elle n’était pas quelqu’un de stable, il le savait. Elle n’était pas non plus sans reproche et ce qu’elle faisait, devait être assez grave si elle craignait que cela éloigne Nate. Évidemment, elle avait tort et rien ne pourrait l’empêcher de tenir à elle, de penser à elle et ce, même s’il décidait de quitter Miami. Il resta là un bon moment, indécis et perdu. Il ne pouvait pas entrer et n’arrivait tout simplement pas à partir non plus. Puis, en voyant l’ombre de Faith près de la fenêtre, en voyant ses doigts tirer légèrement le rideau il soupira. Il sentait qu’elle avait besoin de lui, peut-être autant que lui l’an dernier. Il la sentait vulnérable et la quitter serait faire exactement ce qu’elle lui avait fait. Et ce n’était plus le genre de Nate, il ne pouvait plus penser seulement à lui. Il se devait d’être là pour elle, même si elle n’avait pas si l’être pour lui. Alors il soupira et ramassa ses valises. Il ne savait pas combien de temps il allait rester, il voulait seulement s’assurer qu’elle allait bien. Il poussa la porte et sans un mot, se dirigea vers la chambre qu’il avait occupé ces derniers jours. Il la referma sans un mot, sans même un regard. Il passait peut-être la nuit, mais il lui en voulait encore énormément.

FIN
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