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| (#) Sujet: Into the White Dim 19 Déc 2010 - 22:06 | |
| « Into the White »
« Comment tu peux être aussi décontracté là dedans, toi Monsieur-je-veux-tout-contrôler ? » grommela Romain en se dandinant, mal à l'aise dans son siège.
Déformation professionnelle ou naturel à l'aise déconcertant avec tout les véhicules qu'ils volent, flottent ou roulent, Gabriel arborait un air paisible et reposé, tout juste trahit par la mince agitation de ses lèvres dont il s'efforçait de contrôler le rictus, à la limite de se faire une crampe aux zygomatiques.
« Justement, je crois que l'absence de pouvoir a quelque chose de libérateur. » expliqua t-il tandis que Samuel, debout sur ses genoux, avait le nez littéralement collé au hublot. « Tu vois, à bord de cet avion, il n'y a rien que je puisse faire pour assurer ma sécurité, c'est reposant dans un sens. Se laisser aller. » puis il se pencha vers Romain et ajouta dans un murmure : « C'est pour ça que j'aime quand tu m'attaches au lit. »
Ils étaient exactement à bord du vol Genève-Chamonix. La mise en place d'une cellule de crise afin d'organiser les secours et de présenter au congrès une demande de fonds nécessaires à la reconstruction après le passage de l'ouragan avait monopolisé sans répit les journées de Gabriel et rogné ses supposées vacances de Noël. Absent et trop souvent pendu au téléphone lorsqu'il était à la maison, le sénateur avait vu fondre le peu de temps libre dont il disposait sans pouvoir en profiter. Maintenant que les choses commençaient enfin à se tasser, il ne leur restait plus à Romain et lui qu'une petite semaine de vacances et celle ci, il était hors de question qu'elle leur passe sous le nez. La décision avait été prise en un clin d'œil : le couple la passerait en amoureux, en Europe à Chamonix Mont Blanc (invariablement prononcé Chamonisque par Romain). Charmant petit bled montagnard coincé entre la Suisse, l'Italie et la France, dans lequel Gabriel venait régulièrement passer ses fins d'années et où il possédait d'ailleurs un chalet.
Toujours est-il qu'avant le départ, son mari avait semblé aussi pressé que lui d'y être et il envoya un grand sourire à Gabriel lorsque que le commandant de bord annonça l'atterrissage. « On arrive enfin ! » Gabriel nota que son sourire aussi ravissant soit-il, avait quelque chose de tendu auquel le soulagement de mettre enfin pied à terre ne devait pas être étranger. Il fit descendre Samuel de ses genoux et annonça avec précaution et prenant bien soin d'esquiver tout contact visuel. « Pas exactement. »
(...) Car le vol Genève-Chamonix n'existait pas réellement. La commune étant dépourvue d'aéroport, il fallait s'y rendre en bus ou train pour les moins fortunés, ou passer par une compagnie privée de transports pour les plus riches, qui emmenait les touristes directement par hélicoptère.
Train de vie de sénateur oblige, c'est cette dernière solution que Gabriel avait adoptée, rallongeant un peu plus le calvaire de sa moitié. Toutes ses tentatives pour le rassurer durant le trajet aéroport > héliport étaient lamentablement tombées à l'eau et maintenant que Romain faisait face à l'hélicoptère qui n'attendait plus qu'eux, Gabriel avait tout le mal du monde à l'y faire monter.
Samuel pour sa part était fasciné par la neige. C'était la première fois de sa vie qu'il en voyait, et calé sur la hanche de son père – qui avait délaissé Romain deux minutes, le temps de donner leurs valises au pilote – le petit garçon, paume en l'air, essayait d'attraper les flocons entre ses doigts maladroits, s'étonnant de les voir disparaître dans sa paume. « Regarde, même Sam a comprit qu'il n'y a pas à avoir peur ! » lança Gabriel en revenant à son époux tandis que l'hélice de d'hélicoptère commençait doucement à battre l'air autour d'eux. D'une main gantée de cuir dont il effleura sa joue, le brun releva le beau visage inquiet vers le sien et dit d'une voix mêlée de vigueur et de tendresse. « Tu n'as rien à craindre, mon ange. Je serais là, tout contre toi. » Puis de son visage, il glissa sa main dans celle du jeune homme et la serra gentiment pour l'encourager à le suivre.
Dernière édition par Gabriel McAllister le Lun 20 Déc 2010 - 2:05, édité 1 fois |
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| (#) Sujet: Re: Into the White Lun 20 Déc 2010 - 0:32 | |
| Planté comme un piquet devant l’hélicoptère dont les hélices brassaient doucement l’air comme pour le narguer, Romain fixait l’appareil maudit d’un regard noir. Comment diable en était-il arriver-là ? Il n’arrivait pas à croire que son mari l’ai entraîner jusqu’en France pour lui offrir une semaine en altitude et sous la neige. Où était donc les Saint-Tropez et les Paris, ainsi que toutes les autres destinations de rêves qui faisaient la gloire de ce pays ? Non, il avait fallu que Gabriel décide de lui faire goûter aux joies de se geler les fesses en altitude. Lorsqu’il avait accepté quelques jours plutôt de laisser à son mari le soin de leur destination de vacances, Romain ne s’était pas attendu à se retrouver ici aujourd’hui. Et encore moins en compagnie d’un hélicoptère et d’une montagne de neige ! Les deux pires ennemis du jeune homme étaient réunis en ces lieux : l’altitude et le froid ! Comment allait-il pouvoir survivre à cette semaine ? Romain ne se sentait pas capable d’affronter de pareille condition de vie !
Malgré le côté très professionnel du pilote et la carlingue flambant neuve de son appareil, le jeune homme ne put s’empêcher de voir dans cet hélicoptère le chariot de la mort elle-même. La crainte de l’altitude s’était emparée de son être. N’y avait-il pas un autre moyen de rejoindre le village ? Romain avait pourtant bien vu à l’aéroport un bus. Son français était plus qu’imparfait mais il lui avait semblé qu’il s’agissait bien de la navette reliant l’aéroport à Chamonix. Ils pourraient l’emprunter, non ?
« Par tous les dieux auxquels je crois – et il y en a un paquet ! Tu ne me feras pas monter dans ce truc-là. » ronchonna-t-il en pointant un doigt accusateur vers la machine. « On va prendre le bus ! C’est plus sûr. » « Regarde, même Sam a comprit qu'il n'y a pas à avoir peur ! » « Ça me fait une belle jambe ! » Romain haussa les épaules avec dédain. Même s’il aimait plus que tout Samuel, la crainte qu’il ressentait vis-à-vis de cet appareil qui allait le séparer cruellement du planché des vaches, l’empêchait de s’extasier devant le petit garçon qui s’emparait innocemment des flocons de neige. « Tu vas me demander de suivre l’exemple d’un petit débile qui a préféré jouer toute la soirée de Noël avec les emballages cadeaux plutôt qu’avec les cadeaux eux-mêmes ? Non mais t'es pas bien ? »
Entêté, Romain resta sur place malgré l’invitation du pilote à embarquer. Il ne se sentait pas de taille à monter à bord de cet engin. De plus, il neigeait ! Déjà qu’en temps normal, il n’aimait pas utiliser l’hélicoptère pour survoler les Everglades, alors en plein début de tempête de neige, c’était mission impossible ! Car oui, à ces yeux, cette neige qui tombait à gros flocons ne présageait rien de bon. Elle tapissait tout de blanc et le vent qui l’accompagnait mordait un peu trop la peau. Et si les vents se déchaînaient en altitude et faisait s’écraser l’hélicoptère contre le flanc de la montagne ? Et si les hélices gelaient et qu’ils tombaient comme une pierre ?
« Tu n'as rien à craindre, mon ange. Je serais là, tout contre toi. »
Quelques secondes, Romain ferma les yeux, savourant la caresse des gants de cuir de son époux contre sa joue, puis il sentit la main de celui-ci se resserrer autour de la sienne. Il n’avait pas le choix apparemment. Gabriel n’accepterait jamais de prendre le bus. L’hélicoptère faisait plus sénateur, plus bourgeois qui débarque dans sa résidence secondaire. Maudit soit donc toute cette fortune ! « Je te jure que si on s’écrase et que tu survis, je t’étripe ! » promit-il alors qu’il tentait de dompter sa crainte. Romain essayait de se persuader que rien n’allait lui arriver. Il inspira profondément l’air un peu trop froid (ce qui lui fit mal aux poumons) pour ensuite se décider enfin à suivre son mari, à contre cœur. La main serrée fortement à celle de Gabriel, il ajouta alors qu’ils se rapprochaient de l’hélicoptère et qu’il sentait monter à nouveau en lui toute son appréhension :
« Gabriel ! Mais… attend ! Tu n’es pas sérieux ?! On ne va pas prendre un hélicoptère en plein blizzard ! C’est limite des stalactites de glace qui nous tombent dessus ! » Il montra d’un doigt paniqué le ciel dans lequel virevoltaient d’épais flocons de neige blancs. « Je ne le sens pas ce plan… je ne le sens pas du tout ! »
Mais malgré sa tentative désespérée de se libérer du sénateur, Romain fut forcer de monter à bord de l’engin maudit. A peine fut-il assit sur son siège que déjà le pilote lui bredouilla quelque chose en français par-dessus son siège. Paniqué, Romain ouvrit de grands yeux. Il se tourna aussitôt vers Gabriel qui installait Samuel :
« Qu’est-ce qu’il a dit ?! Y a un truc qui cloche ? » Il lança un regard soupçonneux. « Et ne me ment pas ! Je sens qu’il est louche le français ! » |
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| (#) Sujet: Re: Into the White Ven 24 Déc 2010 - 7:01 | |
| « Je te jure que si on s’écrase et que tu survis, je t’étripe ! » « Toi ? » ricana le brun. « T'es rongé par les remords rien qu'en écrasant un escargot sur la route. »
La victoire lui semblait presque trop facile. Gabriel resserra néanmoins ses doigts autour de sa main (maintenant qu'il avait harponné le poisson, plus question de le lâcher), et s'en retourna vers l'hélicoptère suivit de près par son réticent mari. Au bout d'à peine trois pas sur les quatre qui les séparaient de l'appareil, Romain commença à gesticuler au bout de son bras. Évidemment.
« Gabriel ! Mais… attend ! Tu n’es pas sérieux ?! On ne va pas prendre un hélicoptère en plein blizzard ! C’est limite des stalactites de glace qui nous tombent dessus ! » Sceptique, l'intéressé leva le nez pour examiner l'état du ciel qui effrayait tant le jeune homme. Bon, okay, il avait vu venir l'ouragan juste avant qu'il ne leur pète en pleine figure - enfin que la fenêtre ne pète au visage de Gabriel - mais là, même en regardant bien, Gabriel ne distinguait rien d'autre que d'innocents flocons grassouillets qui tournoyaient paresseusement. Le tout porté par un vent plus qu'acceptable. Ahlala, Romain et le mélodrame, une grande histoire d'amour.
Il haussa les épaules d'un air faussement navré et aida Romain à monter... Enfin celui-ci dirait sans doute qu'il l'avait jeté à l'intérieur, mais ce n'est pas comme s'il n'avait pas déjà essayé la méthode douce et le coup du « Fais moi confiance mon amour, je suis là, même si on s'écrasait mon corps serait le matelas qui sauverait ta vie. » Technique qui généralement fonctionnait à tout les coups.
A peine le laissa t-il quelques secondes sur son siège et sans surveillance, le temps d'ajuster la ceinture de Samuel à son petit corps d'enfant, que le pilote lançait un « Pas la peine d'attacher vos ceinture, fait beau aujourd'hui. » dans le but supposé de détendre Romain qui ne parlait hélas qu'un français approximatif, et déclenchait une nouvelle explosion nucléaire hystérique.
« Qu’est-ce qu’il a dit ?! Y a un truc qui cloche ? Et ne me ment pas ! Je sens qu’il est louche le français ! » Gabriel tourna la tête, à deux doigt de riposter quelque chose comme : « Pose tes fesses et arrête de m'emmerder sinon je t'assomme et on sera tous tranquilles.» Mais de un, si le pilote pourrait peut-être comprendre le bien fondé de ce geste, Samuel lui se mettrait à brailler et la seule personne capable de le calmer, c'était justement Romain. De deux, il n'était pas convaincu que ce soit la meilleure façon de commencer leur semaine de vacances.
Au lieu de ça, il pinça les lèvres dans une expression embarrassée, feignant d'hésiter de lui révéler l'information capitale. Il termina d'attacher Samy à gestes pressés, en comédien d'exception qu'il était et prit enfin place à dans son propre siège en annonçant du bout des lèvres : « Il a dit qu'une tempête de neige arrive, et qu'il faut partir au plus vite si on ne veut pas risquer l'accident. » Ah ça, c'était un coup bas, et un beau ! Il le paierait très cher un jour, mais pour le moment, Gabriel était trop occupé à graver dans sa rétine la jolie blancheur qui envahissait les traits de son époux. Et cette moue craintive, si vulnérable et parfaitement adorable... puis enfin, la récompense : Romain vint se pelotonner contre lui pour ne plus le lâcher de tout le trajet. Fier de son sale coup, Gabriel ronronna silencieusement de plaisir jusqu'à l'atterrissage, où le jeune homme sauta hors de l'appareil sans un regard ni pour lui ni pour Samuel, comme si l'hélicoptère allait le happer et l'emmener se crasher à flan de montagne.
Une fois hors de l'héliport, Gabriel réajusta le bonnet de Samuel sur sa tête en se plaignant avec force. « T'as vu comme il est méchant avec nous ? Il a osé te traiter de petit débile. » Le regard assassin qu'il sentit immédiatement lui brûler la nuque vint interrompre ce moment de complicité filial et le brun se retourna en changeant de sujet. « Un ami va nous conduire au chalet. » Son regard dévia sur la route et il reconnu tout de suite le vieux pick-up rouge dudit ami. « Justement le voilà ! »
Il perdit un peu de son entrain en remarquant que le pick-up dévalait la route à une allure un peu trop vive... Force était de constater qu'en plus, il zigzaguait étrangement. Il n'y avait pourtant aucune trace de verglas. Ce qui devait arriver arriva forcément. Terminant sa course dans le parking à une vingtaine de mètres du couple, le véhicule fit un dernier dérapage, et vint s'encastrer dans un arbre.
Immédiatement, Gabriel fourra Samuel dans les bras de Romain et alla secourir le conducteur.
« Manny ? Manny, tout va bien ?... » Il dégaina son cellulaire. « Je vais appeler une ambulance. » « Non ! » coupa l'occupant du véhicule en s'extirpant de l'habitacle. « Ça va, je vais bien. » affirma t-il en titubant, si bien que Gabriel du le soutenir et l'aider à s'adosser contre la carcasse du véhicule.
Manny (de son vrai Emmanuel Tricotin, mais il tenait à ce que Gabriel l'appelle Manny, ca faisait plus américain selon lui) devait les emmener dans la propriété du sénateur, à trois kilomètres de là. Il était le fils du propriétaire d'un bar-tabac du coin. Un ami de vacances. Bien qu'au fur et à mesure que Gabriel s'était rapproché du sommet de la hiérarchie américaine, Manny lui s'était rapproché des bouteilles de son bar. Ducoup là, on savait pas trop s'il titubait à cause de la violence du choc ou s'il était juste ivre, ni même si son visage rubicond était dû au froid ou a l'alcool. Un type avenant et chaleureux, mais lui demander de les conduire au chalet n'était pas la meilleure idée de Gabriel. Seulement voilà, il avait promis à Romain des vacances simples et authentiques, et un homme n'a qu'une parole, surtout après s'être autorisé l'entorse de l'hélicoptère pour économiser 1h30 de trajet.
Après s'être assuré que Manny tenait sur ses jambes avec le seul appuie de la carrosserie, Gabriel fit rapidement le tour du pick-up.
« Je voudrais pas avoir l'air pessimiste, mais l'arbre à plus de chances de s'en tirer. » confia t-il discrètement à son époux, confirmant que leur moyen de transport venait de rendre l'âme, sachant qu'il y avait peu de chances pour qu'un taxi puisse les emmener dans le coin perdu où se trouvait le chalet.
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| (#) Sujet: Re: Into the White Ven 24 Déc 2010 - 18:21 | |
| « L’hélicoptère est solide ! L’hélicoptère est solide ! L’hélicoptère est solide ! » Voilà tout ce que Romain ne cessait de se répéter à voix basse, alors que la machine infernale fendait le ciel en direction de l’héliport. Blottit tout contre Gabriel, son visage enfuit dans le cou de ce dernier, Romain respirait à grand poumons l’odeur de son époux afin de calmer son angoisse. Elle était sans cesse toujours plus grande à chacun des soubresauts de l’appareil. Les yeux fermés, il se cramponnait à Gabriel comme si sa vie en dépendant. L’idée même qu’une tempête de neige les fauches de plein fouet et en plein vol le terrifiait. Romain aurait donné tout et n’importe quoi pour que ce cauchemar se termine enfin. Il dû cependant attendre près d’un quart d’heure avant que l’appareil ne se pose. Les quinze minutes de trajet lui avaient semblé être une éternité, si bien qu’une fois la lourde porte ouverte, il n’hésita pas à se précipiter dehors pour rejoindre son sacro-saint plancher des vaches ! Enfin, il mettait pieds à terre, et enfin, il pouvait vénérer à nouveau la déesse gravité qui le retenait scotché au sol.
« Tu te venges c’est ça ? On t’a fait du mal lorsque tu étais petit ? » bouda Romain alors qu’il s’empressait de quitter la piste d’atterrissage pour l’entrée du petit parking bordés de nombreux sapins enneigés. « Je te savais mesquin Gabriel, mais à ce point-là, c’est carrément du vice ! T'es pire que moi. Et pourtant on sait tous les deux que j'en tiens un gros bout. »
Tout en se frictionnant vigoureusement afin de se prémunir du froid hivernal, Romain fixa les environs. Le coin avait l’air paumé au milieu de nulle part. A part quelques habitations des plus rudimentaires, une vache qui broutait du foin derrière une clôture, et un misérable puit comme il n’y en avait que dans les films, il n’y avait pas âmes qui vivent aux alentours. Comment allaient-ils se rendre au chalet s’il n’y avait même pas de voiture qui les attendait sur le parking ? Est-ce qu’ils devraient s’y rendre à pieds ? Avec leurs valises ? Romain jeta à peine un coup d’œil au pilote qui déchargeait les bagages et les déposait un peu plus loin sur le côté du parking, près d’un monticule de neige déblayées. Lorsque Gabriel arriva enfin à sa hauteur en plaisantant avec leur fils, Romain abattit sur lui un regard courroucé.
« Lorsque nous avons parlés de vacances authentiques, j’avais espéré que ton côté je me torche le cul dans des billets de cent dollars prenne quand même un petit peu le dessus sur toi. Je ne m'attendais pas à ce que tu prennes ça au pied de la lettre. » Romain n’arrivait pas à croire que son mari l’ait emmené dans ce genre de trou paumé. Où était donc le strass et les paillettes dont raffolait tant le sénateur ? Au vu des environs, Romain craignait de voir le fameux chalet décrit comme la « huitième merveille du monde » des chalets franco-suisse. « Et maintenant ? On fait quoi ? Si jamais ton chalet décrit comme grandiose est ce truc-là avec la vache, je te promets mon amour que cette semaine, c’est elle que tu pourras sauter car moi tu ne me toucheras même pas ! » « Un ami va nous conduire au chalet. » Il indiqua une direction. « Justement le voilà ! »
Perplexe, Romain regarda l’arrivée zigzagante du pick-up. La grosse voiture rouge allait un peu trop vite à son goût. Si elle continuait à cette vitesse, elle n’allait pas pouvoir freiner à temps et éviter l’un des arbres bordants la route boueuse, enneigée et détrempée. Comme il l’avait estimé, l’accident fut inévitable. La voiture vint percuter un arbre qui laissa choir sur le capot une dose impressionnante de neige. Romain récupéra Samuel qu’il cala sur sa hanche pendant que Gabriel allait s’assurer de l’état du conducteur. Ce dernier semblait aller bien, même si son visage rubicond trahissait une dose excessive d’alcool dans le sang, et son embonpoint au niveau de la taille un goût prononcé pour la bibine et la bonne chaire local.
« Je voudrais pas avoir l'air pessimiste, mais l'arbre à plus de chances de s'en tirer. » « C’est lui notre chauffeur ? Cette grosse barrique sentant la piquette à plein nez ? » s’exclama Romain alors que Gabriel continuait à faire le tour du véhicule. « Chéri, si pour je ne sais quelle raison obscure, tu as décidé de nous éliminer Samy et moi, dit-le tout de suite et je te passerais le plan des Everglades. Je t’aiderais même à y trouver un marécage sympa afin d’y jeter nos corps lestés de béton. Autant crever dans un trou qui me plait ! »
Un long soupir d’agacement s’échappa des lèvres du jeune homme. Et maintenant ? Comment allait-il rejoindre le mystérieux chalet si le seul véhicule présent était en rade et que son chauffeur tenait à peine debout ? Romain n’arrivait pas à croire que Gabriel lui fasse un plan pareille. Lui qui était d’ordinaire si organisé et méticuleux, il montrait aujourd’hui une facette plus bohème de sa personnalité. C’était bien le moment de se la jouer moins milliardaire et plus monsieur tout le monde ! Romain sentait que ces vacances allait tourner au cauchemar. La nuit allait tombée, une tempête de neige approchait et eux, ils étaient bloqués sur un chemin en plein trou perdu. « Ca y est, je vais perdre mes doigts de pieds et je ne pourrais plus jamais marcher ! » se dit-il alors qu’il sentait le froid mordre à travers ses bottines de ville.
Planté en plein milieu du chemin, Samuel dans les bras et le haut du bonnet plein de neige, Romain jeta un regard assassin à son époux, puis à l’ami de celui-ci. Ils avaient tout intérêt ces deux guignols à ce qu’ils ait prévus un plan B ! Car si les treks dans les Everglades infestés d’alligators n’avaient jamais fait peur à Romain, une balade en pleine montagne, à la nuit tombée, au milieu de la neige, chargé de valises et avec des bottines de ville, lui faisait extrêmement peur. La neige n’était pas l’univers du jeune homme. Il n’était pas du tout à l’aise avec elle.
« Qu’est-ce qu’on fait ? On allonge ton gros copain et on l’utilise comme une luge pendant que tu joues au chien de traîneau ? » Il haussa les épaules, terriblement irrité par tout ceci. Pendant que Gabriel et son alcoolique de copain français trouvaient une solution à leur problème, le jeune homme décida de rejoindre les valises afin de s’asseoir dessus et de patienter, mais en chemin, son pied glissa sur une plaque de verglas recouverte de neige. Sans qu’il ne puisse l’éviter malgré sa tentative désespérée de retrouver l’équilibre, il chuta lourdement sur le côté, Samuel accroché à lui. Le côté de la cuisse droite dans une flaque de boue enneigée, Romain poussa un cri. Heureusement pour lui, seul son long manteau et le bas de son pantalon, ainsi que sa botte subirent les dégâts. Quant à Samuel, il riait, amusé de se retrouver ainsi à terre et cramponner à Romain. « J’EN AI MA CLAQUE McALLISTER ! POURQUOI TU NOUS AS EMMENÉS ICI ?! » |
| | | InvitéInvité
| (#) Sujet: Re: Into the White Mer 29 Déc 2010 - 16:49 | |
| « Qu’est-ce qu’on fait ? On allonge ton gros copain et on l’utilise comme une luge pendant que tu joues au chien de traîneau ? » « Qu'est ce qu'il a ? » demanda Manny à Gabriel comme s'il ne venait pas de se prendre un arbre et de les planter tout les quatre au milieu du part. « Fais pas attention... Il fait ça souvent. » répondit l'interessé avec un air d'impuissance dans le regard. Pour les présentations en bonne et due forme c'était râpé. Fichu caractère... Tous les hommes prompt à dire « Ah les femmes ! » avec tout ce que cette phrase implique de complications typique à la gente féminine, n'avaient vraiment aucune idée de ce que pouvait être la vie avec un homme tel que Romain.
« Bon, faut que j'appelle la dépanneuse. » constata Manny, tirant Gabriel de ses pensées et de la contemplation de son époux qui s'en allait tenir compagnie à leurs bagages.
Il jeta automatiquement à un coup d'œil à son téléphone toujours dans sa main, puis posa prudemment une question cruciale. « Tu connais le numéro ? »
Les ridules rouges aux coins des yeux du français se plissèrent dans une expression qui signifiait clairement que non, il ne connaissait pas le numéro de la dépanneuse.
« Mais oncle Phil à de quoi la remorquer ! » rétorqua t-il plein d'espoir, avant de jeter un regard désolé à son fidèle pick-up. « On peut pas le laisser là, le pauvre. » Et Gabriel reconnu dans sa détresse toute l'affection que lui même pouvait porter à son Aston Martin, que jamais ô grand jamais il ne laisserait seule dans la neige, même réduite à l'état d'un tas de taule fumant. Au moins, ils savaient quoi faire de la carcasse du pick-up, à défaut de savoir quoi faire des leurs.
Tandis que Manny appelait l'oncle Phil, qui au vu de leur conversation en aurait lui-même pour trois bonnes heures à cause de la neige et de la nuit cumulées, Gabriel se mit à réfléchir intensivement à un autre option qui n'impliquait pas de passer lesdites trois heures – voir plus, car la proximité avec la bouteille chez les Tricotin, c'était une affaire de famille – à se les geler sur un parking lorsqu'il entendit un cri suivit d'un éclat de rire de Samuel. D'accord Romain boudait, c'était son droit de se rendre inutile vu le début somme toute chaotique de leur voyage en amoureux, mais il ne pouvait pas bouder en silence ? Il essayait de leur épargner une nuit sur le parking lui !
Excédé, Gabriel se retourna vivement vers l'origine du bruit qui parasitait sa concentration « Hé chéri, tu voudrais pas faire un peu moins de bruit ? Je suis en train de chercher une solution là, tu joueras avec Samuel quand on sera arriv... » Il s'interrompit bouche ouverte devant le spectacle lamentable de Romain affalé dans une flaque, visiblement très, très énervé et sur le point de lui faire passer un sale quart d'heure. Crainte confirmée presque immédiatement. « J’EN AI MA CLAQUE McALLISTER ! POURQUOI TU NOUS AS EMMENÉS ICI ?! »
Le sénateur lança un rapide regard en biais à Manny. Le genre de regard qu'un homme lance à un autre homme et qui veut dire « Je dois y aller. Situation de crise, ma femme (ou mon mari dans le cas présent) va me tuer. » Et vola aussitôt à la rescousse de sa douce moitié.
Il enleva d'abord Samuel de son perchoir, qui dans un réflexe de poisson-pilote apprit auprès de Romain, agrippa automatiquement un pan du pantalon de son père. Gabriel nota qu'il était plus que temps qu'il prenne en main l'éducation de son fils et lui inculque quelques notions basiques d'indépendance. Puis il aida son époux accidenté à se relever tout en s'assurant qu'il ne s'était pas fait mal et tint son visage en coupe entre ses mains.
« Mais mon amour, on va trouver une solution ! » affirma Gabriel en ponctuant sa phrase d'un baiser tout les deux mots. Après avoir passé la journée en avion, puis effectué un périple en hélicoptère et essuyé un accident de voiture, il n'avait pas pu embrasser son époux de la journée, et il commençait à être sacrément en manque de lui. Hélas, le moment n'était pas encore bien choisi pour ça et Gabriel se contenta donc de le serrer contre lui en avisant les alentours comme si l'un des nombreux dieux du jeune homme avait déposé la solution à leurs problèmes dans le décor.
Et là miracle. Il aperçut au coin du parking une calèche, munie de son cheval. La calèche qui faisait le tour des hameaux pendant la période des fêtes pour faire balader les touristes et arrondir les fins de mois de son propriétaire. Un fin sourire victorieux s'était dessiné sur le visage du brun lorsqu'il desserra son étreinte et baissa son regard sur le visage de Romain. « Bouge pas. »
Il monta à la place du cocher, qui lui n'avait pas montré signe de vie depuis leur arrivée, et attrapa les rênes. Un coup à droite pour aller à droite. Un coup à gauche pour aller à gauche. Claquer pour avancer. Tirer pour freiner. C'était pas sorcier après tout. Et puis il allait bien falloir que sa culture télévisuelle fasse l'affaire, parce qu'il n'était pas question qu'il laisse son Romain congeler surplace maintenant qu'il avait réussit à se tremper une jambe.
« Tu vas pas voler la calèche du père Dupré ?! » s'exclama Manny en le voyant approcher d'eux à bord de son nouveau véhicule. « C'est un emprunt ! » objecta Gabriel entre deux claquement de sabots « Je la ramènerai ici demain. » Puis il adressa un signe de tête et un clin d'œil charmeur à Romain. « Allez bébé, grimpe dans mon carrosse. Je t'emmène dans un petit coin de paradis. » |
| | | InvitéInvité
| (#) Sujet: Re: Into the White Lun 3 Jan 2011 - 14:21 | |
| Malgré tout le plaisir qu’ils pouvaient procurer ordinairement, les baisers déposer sur ses lèvres par Gabriel ne suffirent hélas pas à chasser entièrement sa mauvaise humeur. Romain était toujours aussi agacé par la tournure que prenait ce début de vacance. La neige, le froid, la tombée de la nuit, les deux vols consécutifs, la chute dans cette flaque glacée, le manque du corps de Gabriel en lui et cet accident de voiture… tout l’irritait au point de vouloir annuler cette escapade européenne. Retourner à Miami lui traversa bien entendu l’esprit mais il savait que son époux ne l’accepterait jamais. Se résigner à rentrer sonnerait trop comme une défaite, et Gabriel n’était pas homme à baisser si facilement les bras. Romain devait donc prendre son mal en patience, mal pourtant de plus en plus étouffé par les bras rassurants du sénateur. Le jeune homme se laissa aller quelques longues secondes à leur étreinte amoureuse, juste le temps de se dire que peut-être, les astres et tout ses dieux n’avaient pas décidés de faire de son séjour en ces terres hostiles un enfer de glace.
Mais hélas, le refuge qu’il avait trouvé dans les bras de l’homme de sa vie ne dura pas. Le grand brun rompit l’étreinte pour - d’un pas rapide - rejoindre une petite calèche touristique dans laquelle il monta sans se soucier du propriétaire. Devant l’approche du cheval de trait, Romain arqua un sourcil mi-amusé mi-incrédule. Comptait-il réellement voler ce véhicule ?
« Tu te prends pour Charles Ingalls ? » « Allez bébé, grimpe dans mon carrosse. Je t'emmène dans un petit coin de paradis. »
Romain resta ébahit devant l’audace de son mari. Où était donc passer le sénateur conquérant et orgueilleux qui maudissait toutes les fois où il devait monter à bord de sa Subaru Impreza tâchée de boue des Everglades, et qui se souciait parfois même un peu trop de son image ? On aurait dit que cet emmerdeur endimanché était resté à la frontière des Etats-Unis, au grand soulagement de Romain qui aimait fréquenter le Gabriel cool, détendu et amusant. En bref, le Gabriel qui ne jouait pas le rôle que son statut de sénateur et son éternelle suffisance lui imposaient.
« Je n’en reviens pas que tu voles une calèche. C’est parce que tu as l’immunité diplomatique que tu joues les petites frappes ? Demain ça sera quoi ? Un braquage de banque ? » Romain haussa les épaules, résigné à l’idée de devoir prendre par au plan B. De toute façon, c’était mieux que rien. Si monter à bord de ce truc leur permettait d’atteindre le petit coin de paradis de Gabriel, Romain fermerait les yeux sur ce larcin. « Bel exemple pour ton fils. »
Pendant que Gabriel et Manny chargeaient les valises à l’arrière de la calèche, et qu’ils discutaient en français, Romain s’installa confortablement à bord du véhicule. Il cala Samuel tout contre lui, mais lorsque le sénateur reprit place derrière les rênes avec son éternel sourire que Romain qualifiait « d’idiot », le petit garçon s’agita. « Moi ! Avec papa ! » disait-il en tendant les bras vers le sénateur. Réticent à l’idée de laisser son petit monter devant, Romain se résigna malgré tout à le laisser faire. Ce n’était pas tous les jours que Samuel reconnaissait Gabriel comme son père et qu’il désirait être avec lui. Si jouer les cochés les rapprochaient, pourquoi les en empêcher ?
Le trajet qui séparait le parking au chalet dura plus d’une petite heure. A chaque détour de chemin enneigé, Romain espérait qu’il n’y ait pas de précipice. Gabriel avait beau tenir habillement les rênes, le jeune homme n’était pas certain que ce soit réellement lui qui forçait l’animal à suivre la route. Mais qu’importe, l’important fut d’arriver à bon port sain et sauf. Et ce fut ce qui arriva. Lorsque la calèche s’arrêta enfin, Romain siffla. La petite bicoque qu’il s’était imaginé durant tout le voyage n’en était pas une. Elle ne tombait pas en rade et les toilettes ne se trouvaient pas au fond du jardin, au bord d’une rivière aux rives infestées d’ours. Au contraire, le chalet – bien qu’enneigé – était grand, spécieux, sur deux étages et située à la l’ornière d’un bois. Romain avait du mal à croire que ce genre d’habitation pouvait exister dans un coin aussi reculé dans la montagne.
« Bah ça alors ! » s’exclama le jeune homme. « Moi qui avait peur d’être à l’étroit. » Il descendit de la voiture à cheval, récupéra Samuel et s’avança vers l’entrée. Le patio avait été déblayé de sa neige, sans doute par la personne qui s’occupait de veiller à l’année sur le bien du sénateur. Après visite du propriétaire, Romain fut totalement rassuré. Les quatre chambres à coucher, le grand séjour faisant également office de salle à manger, le sauna, le jacuzzi, la mezzanine, la table de billard, les deux salles de bain, la belle cheminée et la grande cuisine eurent raison de ses inquiétudes. La vie à la montagne ne serait pas aussi spartiate que prévue.
********** La porte de la salle de bain se referma derrière lui. Tout en réajustant le jeans sec et propre qu’il venait d’enfiler, Romain descendit à la cuisine, animé par le désir de fouiller les placards à la recherche de quelque chose à se mettre sous la dent. Par chance, sur la table, il trouva une caisse en bois dans laquelle se trouvaient quelques bouteilles de vin rouge, du cidre, du café, du lait, du sucre, des œufs, deux baguettes de pain, un pot de confiture à la fraise, du fromage, des lardons, quelques légumes dont des oignons et des carottes, des pommes de terre, du chocolat suisse, de la charcuterie, des céréales, des poires, un peu de beurre et du miel. En bref, la personne qui s’était occupée de déblayer le patio de la neige leur avait apporté également de quoi passer l’avant-midi de demain en toute quiétude, et ce afin d’éviter qu’ils ne descendent au village le plus proche dès ce soir. C’était une bonne initiative car Romain commençait à avoir réellement très faim. En Amérique, il devait être l’heure du dîner.
Pendant que Gabriel s’occupait de préparer un feu dans l’âtre et que son fils l’aidait en jacassant dans un langage qui lui était propre, Romain entreprit de d’abord ranger les courses (ce qui lui permit de fouiller dans les placards et les tiroirs afin d’y trouver ses marques), puis il prépara le repas tout en discutant par téléphone avec Andrew resté en Amérique pour préparer ses examens. Une fois les omelettes aux lardons et aux oignons prêtes et sa discussion terminée, Romain rejoignit Gabriel et Samuel. Il s’accroupit à côté d’eux, près des flammes naissantes.
« C’est ça votre feu mes hommes ? Un briquet fait plus de chaleur. » lâcha Romain en caressant la petite tête brune de Samuel qui soufflait à gros poumons sur les flammes à peine naissantes. « J’ai eu le temps de changer de pantalon, d’appeler Andrew et de vous préparer des omelettes. Et vous, vous êtes n’être même pas capable d’allumer deux trois bouts de bois pendant ce temps ? » Le sourire du jeune homme s’agrandit alors que son visage se rapprochait de celui de son mari. « Et ne me sort pas l’excuse que vous avez du attacher le cheval derrière le chalet. Ca vous a prit quoi ? Cinq minutes ? » Romain gloussa. « Admet simplement que tu as du mal à retrouver tes instincts de montagnard monsieur le sénateur. » Il l’embrassa alors tendrement, ne pouvant résister plus longtemps. « Une fois que vous aurez réussi à nous évitez l’hypothermie, vous pouvez venir manger. Le repas est prêt. » |
| | | InvitéInvité
| (#) Sujet: Re: Into the White Mer 5 Jan 2011 - 17:16 | |
| Accroupit devant l'âtre qui dégageait de plus en plus de chaleur, Gabriel se félicitait intérieurement de ne pas avoir perdu la main en matière d'allumage de feu. A côté de lui, Samuel jetait dans les flammes des boules de papier journal que son père avait mis à sa disposition pour qu'il l'aide à sa hauteur d'enfant de deux ans, et ce même s'il mettait un temps considérable – et faisait tout le bruit qui allait avec – à les déchirer puis à les froisser.
Peu à peu, une douce chaleur envahissait les lieux et l'odeur du repas que Romain préparait (d'un commun accord entre le couple vu qu'après la visite des lieux, Gabriel lui avait chipé Samy des bras en attribuant les rôles avec une pointe de moquerie envers son époux qui s'était déjà vu revenir un siècle en arrière « Nous hommes, aller ranger cheval et faire feu pour femme, pendant que femme faire à manger pour hommes. ») captait de plus en plus l'attention du brun qui jetait fréquemment des coup d'œils avides en direction de la cuisine. Lorsqu'il vit son mari en émerger, il tourna vivement la tête vers son feu, l'air de ne pas y toucher. « C’est ça votre feu mes hommes ? Un briquet fait plus de chaleur. J’ai eu le temps de changer de pantalon, d’appeler Andrew et de vous préparer des omelettes. Et vous, vous êtes n’être même pas capable d’allumer deux trois bouts de bois pendant ce temps ? Admet simplement que tu as du mal à retrouver tes instincts de montagnard monsieur le sénateur. » Le sénateur ronchonna silencieusement pour la forme. Il aurait bien répliqué que lui au moins à défaut de retrouver ses instincts montagnards, ne s'était pas vautré dans une flaque de boue en plein milieu d'un innocent parking dégagé, mais Romain captura en même temps que ses lèvres toute trace de résistance à ses vacheries. Gabriel était désespérément faible face à ce genre d'argument, il avait bien essayer d'y remédier mais toute sa volonté succombait inexorablement devant les charmes du jeune homme. « Une fois que vous aurez réussi à nous évitez l’hypothermie, vous pouvez venir manger. Le repas est prêt. »
Pas besoin de lui dire deux fois. Certes le feu n'était pas encore très vaillant, mais il avait prit et quelques bûches de plus suffiraient à le faire croître pendant qu'ils dîneraient. Aussi Gabriel s'exécuta puis se redressa et s'étira en faisant rouler ses muscles sous sa peau avant de baisser les yeux sur Samy qui reposait soigneusement le soufflet a côté du tisonnier. « Aller viens bonhomme, on a bien mérité de reprendre des forces. »
Une fois à table, Gabriel rapprocha significativement sa chaise de celle de Romain. D'abord pour avoir le simple contact de sa jambe contre le sienne, puis il glissa une main aventureuse à l'intérieur de sa cuisse. Les deux époux échangeaient un regard langoureux lorsqu'un un "pik pik" un peu trop insistant attira leur attention. Concentré sur son assiette, Samuel s'échinait à essayer d'attraper un lardon à la fourchette, sans succès. Aussitôt, Romain esquissa un geste pour l'aider mais Gabriel le retint en lui lançant un regard d'avertissement. Hors de question qu'il fasse de leur fils un petit assisté ! Pendant les secondes qui suivirent, les deux parents fixèrent le petit garçon sans rien dire. La main de Gabriel posée sur celle de Romain, la serrant un peu pour lui rappeler qu'il veillait au grain et que toute intervention de mère louve serait sanctionnée. Puis enfin, Samuel délaissa sa fourchette et s'empara du petit morceau de viande avec ses doigts, sous le regard admiratif de Gabriel qui après l'avoir félicité, nargua un peu Romain : « Tu vois, il a de qui tenir. » commença t-il narquois. « Sam est un petit homme qui sait laisser son côté je me torche le cul dans des couches à cent dollars quand la situation l'exige. »
Puis considérant que Samy, qui avait décidé de manger ses lardons un par un avant de s'attaquer à l'omelette, les garderait à table encore longtemps, Gabriel décida de s'éclipser avant tout le monde pour se donner bonne conscience et vérifier l'état du feu.
C'est au bout d'une longue demi-heure et alors qu'il taquinait les braises du bout du tisonnier (et commençait doucement à crever de chaud) qu'il vit Romain apparaître, un Samy rincé par l'effort et la fatigue dans les bras. « Je te laisse le coucher. » dit-il doucement en se levant pour embrasser le petit garçon. En fait, il espérait vivement que Romain n'insisterait pas pour qu'ils le mettent au lit ensembles : il avait d'autres projets en tête. Par chance, son adorable époux acquiesça et dès qu'il quitta son champ de vision, Gabriel se mit à l'œuvre. Il éteignit les lumières, la lueur chaude et orangée des flammes éclairant la pièce d'une lumière tamisée. Il alla ensuite chercher deux larges verres à vin, déboucha une bouteille de vin rouge et remplit les deux coupes qu'il déposa sur la table basse, après quoi il farfouilla dans la corbeille de fruit en quête du Graal... Ah ! Des fraises et des raisins, parfait ! Il repéra aussi un ananas, jeta un coup d'œil inutile en arrière, tendit l'oreille pour écouter les éventuels pas de Romain qui revenait... Pas de bruit, pas de pas, pas de Romain. Le brun s'affaira donc à dépiauter le fruit et à le couper en fins morceaux qu'il déposa également sur la table basse devant la cheminée.
La partie la plus délicate s'annonçait. Il s'agissait de mettre en évidence près du feu le tapis en vraie peau d'ours qui ferait hurler Romain et qui était jusque là planqué dans un coin du salon. Gabriel hésita un instant, cette audace pouvait bien lui couter sa fin de soirée en amoureux. Ah et puis qui ne tente rien n'a rien ! Le sénateur n'était pas homme à faire dans la demi-mesure.
Aussi lorsque Romain revint dans le salon, Gabriel l'accueillit en déposant un léger baiser sur sa main puis fit mine de s'excuser de son décor à l'atmosphère intime. « Pardonne moi, le vin, la cheminée, la... » se refusant à prononcer à haute voix le nom de l'objet du crime, il désigna simplement la peau d'ours du regard puis reprit « C'est tellement cliché. » Il prononça ce dernier mot non sans un certain accent, ce qui donnait quelque chose comme "clichey" « Mais j'ai pas pu m'en empêcher. » Puis il s'accroupit et tapota la fourrure épaisse et déjà tiédie par la chaleur des flammes pour inviter Romain à s'y asseoir. « T'as rien à craindre, il est déjà mort. » Et là, c'est moi qui suis mort songea t-il tout sourire. Il précisa néanmoins « De sa belle mort. » |
| | | InvitéInvité
| (#) Sujet: Re: Into the White Jeu 6 Jan 2011 - 16:58 | |
| S’il y avait bien une chose que Romain savait depuis qu’il s’occupait matin, midi et soir de Samuel, c’était que si on laissait le petit garçon n’en faire qu’à sa tête, il serait capable de manger les grains de riz un par un. Mais ça, Gabriel semblait ne pas s’en rendre compte. Si Romain avait voulu lui venir en aide avec son lardon, c’était uniquement pour gagner du temps. Mais soit, si Gabriel estimait que Samuel était assez grand pour manger seul, très bien. Il verrait combien ne pas assister son fils ferait traîner en longueur ce dîner. Devant l’assiette de Samuel qui ne désemplissait pas de nourriture, Romain resta stoïque. Il se contentait de picorer son omelette aux oignons et au fromage, en mâchouillant un bout de pain recouvert de beurre. Il attendait simplement, patiemment le moment où inévitablement Gabriel en aurait assez de traîner ainsi à table. Et ce moment arriva bien vite. Le sénateur s’éclipsa, prétextant de devoir rajouter quelques bûches dans l’âtre. Romain profita de son absence pour reprendre les choses en main et assister Samuel afin qu’il vide sa petite assiette un peu plus vite. Avec un plaisir plus qu’évident, il lui donna donc la becté.
Une fois le dessert engloutit (un yaourt à la fraise), le repas terminé et la table débarrassée avec l’aide du petit garçon, Romain estima qu’il était grand temps d’aller le coucher. Il était près de 21 heures et en Amérique, cela ferait plus d’une heure et demi que Samuel serait déjà au lit. Tout en le portant dans ses bras, Romain rejoignit Gabriel près de la cheminée.
« Il est l’heure du dodo, papa. » « Je te laisse le coucher. » répondit le sénateur en se levant pour embrasser son fils.
Romain vola un rapide baiser à son mari avant de monter à l’étage. Dans le couloir, sur sa route, il y avait plusieurs photos encadrées. Certaines représentaient Gabriel en train de faire du ski, tandis que d’autres représentaient des moments de vie volée autour d’une table généreusement garnie. Gabriel avait dû passer un Noël dans le coin s’il en croyait le bonnet de père Noël que portait sur la tête son ami Manny, et la fondue savoyarde qu’ils s’enfilaient. Avec Samuel, il prit le temps de regarder quelques instants les clichés sur leur trajet. Le petit garçon pointait son doigt sur son père qu’il reconnaissait au milieu des clichés, et parfois ailleurs, sur des objets dont il connaissait le nom. Encore une fois, Romain ne trouva aucune photo de la famille de son époux. A part Andrew qu’il venait de voir étalé au pied du tire-fesses, il n’y avait ni photos de Viviane, ni même de son mari. Le jeune homme n’avait d’ailleurs pas souvenir d’avoir déjà vu une photo du père de Gabriel. Malgré les nombreux mois écoulé depuis leur mariage, celui-ci restait encore une énigme.
« Un nours ! » s’exclama Samuel en indiquant du bout du doigt une photographie sur l’autre mur. « Papa et un nours ! »
Lorsque Romain la vit, il roula les yeux en étouffant une petite injure. Le cliché représentait Gabriel en compagnie de son ami Manny et d’un vieux bonhomme qui - à en croire la forte ressemblance physique - devait sans doute être le père du français. Fusil de chasse à la main, posture de chasseur au torse bombé et pied posé sur la dépouille d’un imposant ours mort, Gabriel se pavanait. Il était fier comme un coq et il débordait d’arrogance. Romain reconnaissait bien là son mari. Cela le fit sourire. Au fond, si l’idée même de chasser pour le sport l’irritait, Romain devait bien admettre qu’il y avait un côté assez grisant à l’idée de savoir Gabriel capable de tuer jusqu’à un ours. Cela le rendait encore plus viril… si c’était possible. Mais ça… plutôt crever que de l’admettre à voix haute.
« Lui c’est papa. » dit Romain en déposant l’index sur la photographie. « Et lui c’est le gros monsieur qui était là tout à l’heure. Il n’avait pas encore son gros bidon de buveur de bière apparemment. Une chance que ton papa n’ait pas suivit ses traces car aussi non, je ne serais jamais tombé amoureux de lui. » Romain indiqua ensuite l’ours. « Là, c’est un ours. Mais rien avoir avec ton Winnie l’ourson. Lui il fait dodo. C’est l’ours qui fait dodo… tout le temps. Tout le temps. Tout le temps il fait dodo. » Il se détourna du cadre et s’avança vers la porte de la salle de bain. « D’ailleurs il est temps que tu fasses toi aussi dodo. »
Après l’avoir rapidement lavé à l’évier, changer sa couche, habillé de son pyjama et brossé ses dents, Romain coucha Samuel. Le petit garçon occupait la chambre juste en face de la leur. Puisque c’était la première fois qu’il dormait dans un lit deux places aussi grand, et seul, Romain préféra délimiter un côté du lit à l’aide de gros coussins, histoire qu’il ne soit pas trop perturbé par tout cet espace gagné. Puis, il alla brancher la veilleuse qui fit tournoyer dans les airs de jolis petits croissants de lune et il lui apporta son doudou. Durant une bonne dizaine de minutes, Romain resta allongé près de Samuel, son visage contre l’épaule du petit garçon dont il respirait l’odeur à pleins poumons. Il attendait qu’il s’endorme, le berçant d’une main tout en fredonnant une petite comptine néo-zélandaise à voix basse.
Romain n’avait aucune envie de le laisser. S’il s’écoutait, il resterait là, à respirer son odeur et à veiller sur lui jusqu’à l’aube. Comment était-ce possible de l’aimer autant ? Le jeune homme ne voyait pas en cet enfant un intrus. Samuel n’était pas une obligation qu’il se coltinait à contrecoeur parce qu’il avait épousé Gabriel. C’était tout le contraire. Ce petit garçon, par sa simple existence, avait sauvé leur couple. Du jour au lendemain, il était entré dans leur vie et il les avait forcés à grandir et à arrêter de se faire du mal. Il avait comblé le vide que Romain ressentait en vivant une relation cachée avec le sénateur. Cela faisait presque un an maintenant qu’il était condamné à l’ombre, et que cette non reconnaissance du monde à son égard le rongeait. Cela faisait près d’un an que Gabriel préférait sa carrière à leur vie de couple. Si Samuel n’était pas arrivé, tout se serait terminé dans les cris et les pleures. Il les avait sauvé. Bien que ce petit garçon ne soit pas son fils, une partie de lui s’était entiché de ce petit être au point d’avoir l’impression de le ressentir dans sa propre chaire. Samuel était important à ses yeux. Sans lui, il n’était pas certain de pouvoir continuer à se satisfaire longtemps encore de n’être que le colocataire du très estimé sénateur.
A contrecoeur, une fois Samuel endormit, Romain quitta à pas feutré la chambre. Il laissa la porte légèrement entrouverte et il redescendit rejoindre le salon. La lumière était tamisée et les flammes du feu faisaient danser des ombres un peu partout. Gabriel l’accueillit en lui embrassant la main. « Pardonne moi, le vin, la cheminée, la... » Romain suivit son regard. La peau d’ours ! Le fameux ours mort de la photo ! Non content de l’avoir abattu, il en avait fait un tapis ! « C'est tellement cliché. Mais j'ai pas pu m'en empêcher. » Tout en roulant les yeux, Romain regarda son époux s’accroupir et tapoter la fourrure épaisse comme pour l’inciter à s’approcher. « T'as rien à craindre, il est déjà mort. De sa belle mort. »
La situation était assez amusante. Croyait-il réellement qu’il aurait assez d’argument pour le faire grimper sur cette peau d’ours mort ? Avait-il oublié qu’il avait épousé un écologiste luttant farouchement pour la préservation des espèces animales du monde entier ? Pensait-il qu’il lui suffirait d’un peu de vin, de quelques fruits et de son sourire ravageur pour l’obliger à ranger dans un coin de son esprit ses convictions ? … … … D’un côté, Gabriel s’était quand même donné du mal pour le surprendre. Le cadre romantique invitait quand même à plus de clémence. Tu trouves ça romantique de te faire peloter sur la dépouille d’un animal écorché ?
« De sa belle mort ? » répéta Romain en souriant, amusé et complice car il savait très bien que Gabriel avait conscience qu’il s’aventurait sur un terrain glissant. « Et à son chevet, il y avait Nif-Nif, Nouf-Nouf et Naf-Naf c’est ça ? Avec ton fils, nous avons vu la belle photo dans le couloir. » Il imita la pose que son époux avait sur la photographie, avouant ainsi connaître exactement les circonstances tragiques de la mort de cette pauvre bête. « Je ne sais pas comment je dois prendre cette incitation à renier mes valeurs. Tu crois peut-être qu’il te suffit d’un peu de vin, d’un beau sourire, de quelques fruits et… » Il sursauta, sur-jouant exprès la surprise. « Oh ! Des ananas ! J’adore les ananas ! » Il sauta innocemment sur la peau d’ours, s’installant confortablement dessus alors qu’il s’emparait déjà d’un bout d’ananas pour le mordiller.
Au diable cette peau d’ours et ses convictions ! Ne pas grimper dessus ne ferait de toute façon pas revenir à la vie l’animal. Et puis, il n’avait aucune envie de gâcher le reste de la soirée. Gabriel avait prit la peine de lui offrir un moment « romantique » au coin du feu, et il n’allait certainement pas laisser ses convictions d’écolo entraver son bonheur. En bon hypocrite qu’il était, Romain rangea ses états d’âme dans un coin de son esprit, les ignorants totalement.
« De toute façon, je suis persuadé que c’est de la fausse fourrure. C’est de la synthétique n’est-ce pas ? Tu n’oserais jamais m’obliger à m’asseoir et à prendre goût à de la vraie fourrure d’ours, hein ? Tu me respecte et m’aime trop pour ça. N’est-ce pas chéri que c’est de la fausse fourrure ? »
Encore une fois, Romain se la jouait angelot innocent prêt à gober n’importe quoi si cela lui permettait de se soustraire à toute responsabilité. Forcer Gabriel à lui dire ce qu’il voulait exactement entendre était un stratagème devenu jeu auquel le couple jouait souvent afin d’accorder leurs violons. C’était là leur manière de jouer et de rester en harmonie, eux qui avait parfois des goûts, des idées et des convictions bien différentes. |
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