Une journée longue et éprouvante attendait Bonnie Whealer. Du haut de ses vingt-trois ans, elle pourrait faire comme les jeunes gens de son âge et profiter du magnifique temps que Miami lui offrait mais non, pas en ce jour de juillet. Malgré un emploi du temps moins chargé, elle devait encore se rendre au Blue Lagoon Bar pour s’investir dans son rôle de serveuse. Certains disaient que c’était dérisoire d’avoir un tel job, surtout pour une fille de la haute. Bonnie aurait pu être de cet avis il y’a plus d’un an, aujourd’hui beaucoup de ce qu’elle aurait pensé avait changé. Et puis, le BLB était loin d’être un bar miteux, il était classe, se fondait dans la masse sans pour autant manquer d’originalité. Les habitants de Miami, et plus particulièrement les Ocean Grovers aimaient s’y rendre pour passer une agréable soirée. Outre son boulot du soir, elle devait régler plusieurs choses et ce, depuis dès son première hors du lit. Elle avait quitté Caleb de bonne heure pour s’occuper de son jogging matinal quotidien puis était rentrée deux heures plus tard, exténuée. Bon sang qu’il faisait chaud, beaucoup trop chaud. Par la suite, sa journée se tourna autour de plusieurs taches ménagères, d’un moment de détente dans sa piscine. Elle avait passé du temps avec Isobel où Bonnie se plaignait encore du meilleur ami de la jeune demoiselle : Rhys Blythe ou encore, un peu de shopping en compagnie d’Avery, sa cousine. En parlant de cette dernière, voilà plusieurs jours qu’elle était arrivée à Ocean Grove, et Bonnie avait toujours un peu de mal à s’y faire même si retrouver une amie et un membre de sa famille l’animait positivement. Néanmoins l’inquiétude était toujours de mise, d’autant plus du côté de Caleb. Ce n’était pas une visite surprise à prendre à la légère chez les Whealer-Varnham.

Vers les dix-neuf heures, elle laissa un bref mot sur le comptoir de la cuisine précisant que le plat était déjà prêt et qu’il suffisait à Avery ou Caleb de le réchauffer. Oui, avec le temps Bonnie devenait de plus en plus douée en cuisine, elle ne brûlait plus les plats, ses gâteaux au chocolat paraissait de mieux en mieux au grand plaisir de Caleb. Bonnie était fière d’elle et de sa capacité à préparer quelque chose de bon à manger. Comme quoi, elle suivait les traces de sa mère et les conseilles de cette dernière servaient finalement plutôt bien. Suivit de cette petite attention, elle quitta la demeure pour rejoindra sa Mazda et partir en direction du centre ville.

Il y’avait un monde fou lorsqu’elle était arrivée au bar, et le fait qu’elle prenne son service semblait ravir nombre de ses collègues. En deux/trois mouvements, elle avait enfilé la tenue adéquate et s’était rendue derrière le comptoir pour satisfaire les clients très impatients. Avec cette chaleur étouffante, même à la tombée de la nuit, les personnes étaient d’autant plus énervées et excitées en temps normal. Ce qui n’était pas un très bon signe, les employés devaient y aller avec des pincettes avec certains. Bonnie était passée par une mésaventure qui lui avait bien appris qu’il ne fallait pas pousser un client. Et en parlant du loup, Bonnie ressortit de l’arrière boutique pour reprendre ses occupations lorsque son regard fut immédiatement attiré par un visage connu. Elle s’avança, ne manquant pas de prendre les commandes qui volaient en même temps mais elle semblait encore un peu sur ses gardes. Ses sourcils fronçaient, elle écouta attentivement les paroles que le jeune homme déblatérait et elle se détendit. C’était plus facile de les différencier maintenant, alors qu’avant elle ressentait toujours une certaine boule à l’estomac quand elle le voyait. Austin et Jonny Lee étaient des frères jumeaux et Bonnie avait vécu une sacrée histoire avec Austin, ce dernier ayant été plutôt entreprenant et violent avec elle. Et même si elle ressentait toujours une petite haine envers le premier, elle s’entendait pas mal avec le second. Il avait eu la mauvaise idée de se faire passer pour son frère, une erreur qu’il s’amusait encore à faire aujourd’hui d’ailleurs mais Bonnie ne tombait plus dans le piège. Il lui sourit alors, elle lui rendit sans difficulté. Elle servit un cosmopolitan à une jeune cliente qui se trouvait non loin de Jonny. Je prends un peu d'avance comme je sais que tu ne tiens pas trop l'alcool ! Bonnie leva les yeux au ciel et posa ses yeux sur lui.

C’est un fait, mais n’en abuse pas trop… je sais comment un Levingston peut être quand il a un verre de trop dans le sang.

Elle parut sérieuse mais son sourire ne s’accordait absolument pas avec son ton. Elle prit le torchon qui se trouvait sur son épaule et s’affaira à nettoyer les traces sur le comptoir tout en se rapprochant de son interlocuteur et se retrouver en face de lui.

Que me réserves-tu pour ce soir ? lui demanda-t-elle en lui jetant de brefs coups d’œil. J’ai follement hâte de connaître ton programme.

« Alors justement, je voulais avoir ton avis parce que j'arrive pas à me décider... En première position, j'ai un petit tour de Miami la nuit, en moto, les cheveux au vent. En deux, j'ai une soirée sur la plage, un peu d'alcool, un action-vérité qui partirait en sucette, un bain de minuit et un retour difficile comme on en a l'habitude. Puis, en trois, moins attrayant, on va en boîte et on fait le concours de celui ou celle qui arrive à faire se séparer le plus de couples ! » Bonnie levait parfois les yeux vers lui, elle était attentive au programme et aux choix qu’il lui offrait. Elle hocha la tête, les informations imprimées dans sa tête. Un torchon dans une main, un verre dans l’autre, elle commença à réfléchir au scénario dans lequel elle s’y imaginait le plus. Avec Jonny, c’était souvent des sorties complètement folles, des sorties qu’elle ne peut faire qu’avec lui. C’était une complicité particulière, s’il y’avait bien une personne dans cette ville à pouvoir faire changer les idées de Bonnie et à lui faire faire n’importe quoi, c’était sans aucun doute ce jeune homme. Caleb n’en serait pas très fier, et c’était bien pour cela que Bonnie se gardait bien de lui en parler. Un sourire un coin étira ses lèvres et s’accentua en entendant de nouveau son ami : « Ton choix sera le mien Bonnie Whealer ! ». En d’autres mots, c’était à elle que revenait la lourde de tâche de choisir leur activité de ce soir. S’ils ne s’amusaient pas assez, elle n’aura qu’à s’en prendre à elle-même. Après une bonne réflexion, elle posa son torchon sur son épaule et reposa le verre à sa place. Ses points rejoignirent le comptoir où elle prit appuie, elle fixa alors Jonny.

« Une balade en moto tu dis ? Je dois t’avouer que j’en ai toujours rêvé… J’ignorai d’ailleurs que tu en avais une, à moins bien sûr (elle s’approcha, comme si elle cherchait à lui dire quelque chose discrètement) qu’on en empreinte une. »

Oui, elle sous entendait bien la voler pour quelques heures. Evidemment ce n’était pas une proposition, peut-être bien que Jonny avait une moto et que Bonnie l’ignorait tout simplement. Après tout ils ne se racontaient pas tout non plus. Mais cela voulait aussi dire qu’elle n’était contre dans le cas où ils devaient passer par cette infraction. Rapidement elle jeta un coup d’œil à sa montre, elle cherchait à savoir pour combien de temps encore elle en avait. Encore quelques minutes à travailler, et elle pourrait enfin quitter le tablier pour se joindre aux côtés de son ami. Les sensations extrêmes, voilà bien longtemps qu’elle n’avait plus peur d’en avoir mais elle ne le montrait pas forcément. Il était évidemment qu’aux premiers abords, on n’imagine pas Bonnie faire des choses totalement dingues juste pour un peu d’adrénaline. Peu de personnes s’en doutaient. Comme quoi il faut se méfier de l’eau qui dort…

« Je reviens, j’ai des clients à servir et je serai à toi. »

Sans attendre une réaction de la part de Jonny, elle le quitta pour rejoindre les personnes qui l’appelaient. Un bon quart d’heure se déroula à une vitesse affolante, au grand plaisir de la jeune femme qui put enfin jeter son tablier là où elle le prenait habituellement. Revenue à la tenue d’une simple civile, elle emboita le pas à son camarade de jeu qui l’attendait patiemment.

« Bien, je suis prête pour cette petite virée sous le clair de lune Levingston. Allons-y. »

Une fois que Bonnie passa la porte du bar, après avoir salué ses collègues, elle passa ses mains dans ses cheveux pour les détacher. Tombant sur ses épaules, un immense sourire aux lèvres, elle appréhendait la balade mais était tout autant surexcitée par cette même idée.